Loi n° 2017-1510 du 30 octobre 2017 renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme (loi SILT) (Lien Legifrance, JO 31/10/2017)

Les principales dispositions
    La loi a pour principal objet de permettre la sortie de l'état d'urgence qui ne peut être reconduit indéfiniment. Pour parer à la menace terroriste qui revêt un caractère durable, elle dote l'Etat, à compter du 1er novembre 2017, de nouveaux moyens juridiques de droit commun permettant de mieux prévenir et lutter contre le terrorisme en dehors de l'application du régime de l'état d'urgence réservé à des circonstances exceptionnelles. Ainsi, les mesures prévues accordent, aux autorités administratives, des pouvoirs très importants, qui portent atteinte à des libertés individuelles et collectives, mais ne sont pas aussi étendus que ceux qui peuvent leur être attribués sous l'état d'urgence et leur mise en œuvre est davantage encadrée par des procédures, soumise à des contrôles et à l'intervention du juge judiciaire.

Chapitre Ier Dispositions renforçant la prévention d'actes de terrorisme (art. 1er à 14)
    Afin d'assurer la sécurité d'un lieu ou d'un événement exposé à un risque d'actes de terrorisme à raison de sa nature et de l'ampleur de sa fréquentation, le préfet de département ou, à Paris, le préfet de police peut instituer par arrêté motivé un périmètre de protection au sein duquel l'accès et la circulation des personnes sont réglementés (art. 1er insérant dans le titre II du livre II du code de la sécurité intérieure un chapitre VI consacré aux Périmètres de protection, art. L. 226-1, et modifiant plusieurs art. de ce même code). L'arrêté est transmis sans délai au procureur de la République et communiqué au maire de la commune concernée. L'arrêté définit ce périmètre, limité aux lieux exposés à la menace et à leurs abords, ainsi que ses points d'accès. Son étendue et sa durée sont adaptées et proportionnées aux nécessités que font apparaître les circonstances. L'arrêté prévoit les règles d'accès et de circulation des personnes dans le périmètre, en les adaptant aux impératifs de leur vie privée, professionnelle et familiale, ainsi que les vérifications auxquelles elles peuvent être soumises pour y accéder ou y circuler, et les catégories d'agents habilités à procéder à ces vérifications. Il indique les agents habilités à procéder, au sein du périmètre de protection, avec le consentement des personnes faisant l'objet de ces vérifications, à des palpations de sécurité ainsi qu'à l'inspection visuelle et à la fouille des bagages. La palpation de sécurité est effectuée par une personne de même sexe que la personne qui en fait l'objet. Pour la mise en œuvre de ces opérations, ces agents peuvent être assistés par des agents exerçant l'activité mentionnée au 1° de l'article L. 611-1 du présent code, placés sous l'autorité d'un officier de police judiciaire. Après accord du maire, l'arrêté peut autoriser les agents de police municipale à participer à ces opérations sous l'autorité d'un officier de police judiciaire. Lorsque, compte tenu de la configuration des lieux, des véhicules sont susceptibles de pénétrer au sein de ce périmètre, l'arrêté peut également en subordonner l'accès à la visite du véhicule, avec le consentement de son conducteur. Les personnes qui refusent de se soumettre, pour accéder ou circuler à l'intérieur de ce périmètre, aux palpations de sécurité, à l'inspection visuelle ou à la fouille de leurs bagages ou à la visite de leur véhicule s'en voient interdire l'accès ou sont reconduites d'office à l'extérieur du périmètre. La durée de validité d'un arrêté préfectoral instaurant un périmètre de protection ne peut excéder un mois. Il ne peut être renouvelé par le préfet de département ou, à Paris, le préfet de police que si les conditions continuent d'être réunies.

    Aux seules fins de prévenir la commission d'actes de terrorisme, le préfet de département ou, à Paris, le préfet de police peut prononcer la fermeture des lieux de culte dans lesquels les propos qui sont tenus, les idées ou théories qui sont diffusées ou les activités qui se déroulent provoquent à la violence, à la haine ou à la discrimination, provoquent à la commission d'actes de terrorisme ou font l'apologie de tels actes (art. 2 insérant dans le titre II du livre II du CSI un chapitre VII consacré à la fermeture des lieux de culte, art. L. 227-1 et art. L. 227-2).. Cette fermeture, dont la durée doit être proportionnée aux circonstances qui l'ont motivée et qui ne peut excéder six mois, est prononcée par arrêté motivé et précédée d'une procédure contradictoire dans les conditions prévues au chapitre II du titre II du livre Ier du code des relations entre le public et l'administration. L'arrêté de fermeture est assorti d'un délai d'exécution qui ne peut être inférieur à quarante-huit heures, à l'expiration duquel la mesure peut faire l'objet d'une exécution d'office. Toutefois, si une personne y ayant un intérêt a saisi le tribunal administratif, dans ce délai, d'une demande présentée sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, la mesure ne peut être exécutée d'office avant que le juge des référés ait informé les parties de la tenue ou non d'une audience publique en application du deuxième alinéa de l'article L. 522-1 du même code ou, si les parties ont été informées d'une telle audience, avant que le juge ait statué sur la demande. La violation d'une mesure de fermeture d'un lieu de culte prise en application de l'article L. 227-1 est punie d'une peine de six mois d'emprisonnement et de 7 500 € d'amende.

    Aux seules fins de prévenir la commission d'actes de terrorisme, le ministre de l'intérieur peut prescrire diverses obligations à toute personne à l'égard de laquelle il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace d'une particulière gravité pour la sécurité et l'ordre publics et qui soit entre en relation de manière habituelle avec des personnes ou des organisations incitant, facilitant ou participant à des actes de terrorisme, soit soutient, diffuse, lorsque cette diffusion s'accompagne d'une manifestation d'adhésion à l'idéologie exprimée, ou adhère à des thèses incitant à la commission d'actes de terrorisme ou faisant l'apologie de tels actes (art. 3 insérant dans le titre II du livre II du CSI un chapitre VIII consacré aux mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance, art. L. 228-1 à L. 228-7).  Le ministre de l'intérieur peut ainsi, après en avoir informé le procureur de la République de Paris et le procureur de la République territorialement compétent, faire obligation à la personne mentionnée : 1° Ne pas se déplacer à l'extérieur d'un périmètre géographique déterminé, qui ne peut être inférieur au territoire de la commune. La délimitation de ce périmètre permet à l'intéressé de poursuivre une vie familiale et professionnelle et s'étend, le cas échéant, aux territoires d'autres communes ou d'autres départements que ceux de son lieu habituel de résidence ; 2° Se présenter périodiquement aux services de police ou aux unités de gendarmerie, dans la limite d'une fois par jour, en précisant si cette obligation s'applique les dimanches et jours fériés ou chômés ; 3° Déclarer son lieu d'habitation et tout changement de lieu d'habitation. Ces obligations sont prononcées pour une durée maximale de trois mois à compter de la notification de la décision du ministre. Elles peuvent être renouvelées par décision motivée, pour une durée maximale de trois mois, lorsque les conditions continuent d'être réunies. Au-delà d'une durée cumulée de six mois, chaque renouvellement est subordonné à l'existence d'éléments nouveaux ou complémentaires. La durée totale cumulée des obligations ne peut excéder douze mois. Les mesures sont levées dès que les conditions ne sont plus satisfaites. Toute décision de renouvellement des obligations prévues est notifiée à la personne concernée au plus tard cinq jours avant son entrée en vigueur. Si la personne concernée saisit le juge administratif d'une demande de référé-liberté présentée sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative dans un délai de quarante-huit heures à compter de la notification de la décision, la mesure ne peut entrer en vigueur avant que le juge ait statué sur la demande. Par ailleurs, la personne soumise aux obligations prévues aux 1° à 3° peut, dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision ou à compter de la notification de chaque renouvellement, demander au tribunal administratif l'annulation de cette décision. Le tribunal administratif statue dans un délai de deux mois à compter de sa saisine. À la place de l'obligation de présentation aux services de police ou de gendarmerie, le ministre de l'intérieur peut proposer à la personne faisant l'objet d'une mesure de restriction de déplacement de la placer sous surveillance électronique mobile, après en avoir informé le procureur de la République de Paris et le procureur de la République territorialement compétent. Ce placement est subordonné à l'accord écrit de la personne concernée. Dans ce cas, le périmètre géographique imposé ne peut être inférieur au territoire du département. Le placement sous surveillance électronique mobile est décidé pour la durée de la mesure de restriction de déplacement. Il y est mis fin en cas de dysfonctionnement temporaire du dispositif ou sur demande de l'intéressé, qui peut alors être assujetti à l'obligation de présentation aux services de police ou de gendarmerie. La personne concernée est astreinte, pendant toute la durée du placement, au port d'un dispositif technique permettant à tout moment à l'autorité administrative de s'assurer à distance qu'elle n'a pas quitté le périmètre défini. Le dispositif technique ne peut être utilisé par l'autorité administrative pour localiser la personne, sauf lorsque celle-ci a quitté ce périmètre ou en cas de fonctionnement altéré dudit dispositif technique. Le décret en Conseil d'État qui fixe les modalités d'application de ces dispositions, peut déterminer les conditions dans lesquelles la mise en œuvre du dispositif technique permettant le contrôle à distance, pour lequel peut être mis en œuvre un traitement automatisé de données à caractère personnel, peut être confiée à une personne de droit privé habilitée à cet effet.
A défaut de faire application des dispositions précédentes, le ministre de l'intérieur peut, après en avoir informé le procureur de la République de Paris et le procureur de la République territorialement compétent, faire obligation à toute personne concernée de : 1° Déclarer son domicile et tout changement de domicile ; 2° Signaler ses déplacements à l'extérieur d'un périmètre déterminé ne pouvant être plus restreint que le territoire de la commune de son domicile ; 3° Ne pas paraître dans un lieu déterminé, qui ne peut inclure le domicile de la personne intéressée. Cette obligation tient compte de la vie familiale et professionnelle de la personne intéressée. Ces obligations sont prononcées pour une durée maximale de six mois à compter de la notification de la décision du ministre. Elles peuvent être renouvelées par décision motivée, pour une durée maximale de six mois, lorsque les conditions continuent d'être réunies. Au-delà d'une durée cumulée de six mois, le renouvellement est subordonné à l'existence d'éléments nouveaux ou complémentaires. La durée totale cumulée de ces obligations ne peut excéder douze mois. Les mesures sont levées dès que les conditions ne sont plus satisfaites. Les possibilités de recours en référé et sur le fond sont les mêmes que pour les obligations indiquées au début mais les conditions de délai pour introduire le recours au fond et du tribunal pour statuer sot différentes. Enfin, le ministre de l'intérieur peut, après en avoir informé le procureur de la République de Paris et le procureur de la République territorialement compétent, faire obligation à toute personne mentionnée à l'article L. 228-1, de ne pas se trouver en relation directe ou indirecte avec certaines personnes, nommément désignées, dont il existe des raisons sérieuses de penser que leur comportement constitue une menace pour la sécurité publique. Le fait de se soustraire aux mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance précédemment indiquées, qui font l'objet d'une procédure contradictoire et sont motivées, est puni de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 € d'amende

.    Sur saisine motivée du préfet dans le département ou, à Paris, du préfet de police, le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Paris peut, par une ordonnance écrite et motivée et après avis du procureur de la République de Paris, autoriser la visite d'un lieu ainsi que la saisie des documents, objets ou données qui s'y trouvent, aux seules fins de prévenir la commission d'actes de terrorisme et lorsqu'il existe des raisons sérieuses de penser qu'un lieu est fréquenté par une personne dont le comportement constitue une menace d'une particulière gravité pour la sécurité et l'ordre publics et qui soit entre en relation de manière habituelle avec des personnes ou des organisations incitant, facilitant ou participant à des actes de terrorisme, soit soutient, diffuse, lorsque cette diffusion s'accompagne d'une manifestation d'adhésion à l'idéologie exprimée, ou adhère à des thèses incitant à la commission d'actes de terrorisme ou faisant l'apologie de tels actes (art. 4 insérant dans le titre II du livre II du CSI un chapitre IX consacré aux visites et saisies, art. L. 229-1). Ces opérations ne peuvent concerner les lieux affectés à l'exercice d'un mandat parlementaire ou à l'activité professionnelle des avocats, des magistrats ou des journalistes et les domiciles des personnes concernées. L'ordonnance est notifiée sur place au moment de la visite à l'occupant des lieux ou à son représentant, qui en reçoit copie intégrale contre récépissé ou émargement au procès-verbal de visite. En l'absence de l'occupant des lieux ou de son représentant, l'ordonnance est notifiée après les opérations, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. La notification est réputée faite à la date de réception figurant sur l'avis. À défaut de réception, il est procédé à la signification de l'ordonnance par acte d'huissier de justice.  La visite est effectuée en présence de l'occupant des lieux ou de son représentant, qui peut se faire assister d'un conseil de son choix. En l'absence de l'occupant des lieux, les agents chargés de la visite ne peuvent procéder à celle-ci qu'en présence de deux témoins qui ne sont pas placés sous leur autorité. La visite ne peut être commencée avant 6 heures ni après 21 heures, sauf autorisation expresse, écrite et motivée accordée par le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Paris, fondée sur l'urgence ou les nécessités de l'opération. Elle s'effectue sous l'autorité et le contrôle du juge des libertés et de la détention qui l'a autorisée. À cette fin, ce dernier donne toutes instructions aux agents qui participent à l'opération. Il peut, s'il l'estime utile, se rendre dans les locaux pendant l'opération et, à tout moment, sur saisine de l'occupant des lieux ou de son représentant, ou de son propre chef, en décider la suspension ou l'arrêt. Afin d'exercer ce contrôle, lorsque la visite a lieu en dehors du ressort du tribunal de grande instance de Paris, il peut délivrer une commission rogatoire au juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance dans le ressort duquel s'effectue la visite. Lorsqu'une infraction est constatée, l'officier de police judiciaire en dresse procès-verbal, procède à toute saisie utile et en informe sans délai le procureur de la République territorialement compétent. Un procès-verbal relatant les modalités et le déroulement de l'opération et consignant les constatations effectuées est dressé sur-le-champ par les agents qui ont procédé à la visite. Si, à l'occasion de la visite, les agents qui y procèdent découvrent des éléments révélant l'existence d'autres lieux répondant aux conditions fixées, ils peuvent, sur autorisation du juge qui a pris l'ordonnance, délivrée en cas d'urgence par tout moyen, procéder sans délai à la visite de ces lieux. Mention de cette autorisation est portée au procès-verbal Le juge qui a autorisé la visite et les juridictions de jugement saisies à cet effet ont accès aux nom et prénom de toute personne identifiée par un numéro d'immatriculation administrative dans le procès-verbal. L'ordonnance autorisant la visite et les saisies peut faire l'objet d'un appel devant le premier président de la cour d'appel de Paris sans que les parties ne soient tenues de constituer avocat. Le premier président de la cour d'appel de Paris connaît aussi des recours contre le déroulement des opérations de visite et saisie autorisées par le juge des libertés et de la détention. L'ordonnance du premier président de la cour d'appel de Paris est susceptible d'un pourvoi en cassation.
Lorsqu'elle est susceptible de fournir des renseignements sur les objets, documents et données présents sur le lieu de la visite ayant un lien avec la finalité de prévention de la commission d'actes de terrorisme ayant justifié la visite, la personne pour laquelle il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace d'une particulière gravité pour la sécurité et l'ordre publics peut, après information sans délai du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Paris, être retenue sur place par l'officier de police judiciaire pendant le temps strictement nécessaire au déroulement des opérations. La retenue ne peut excéder quatre heures à compter du début de la visite et le juge des libertés et de la détention peut y mettre fin à tout moment.
Aux seules fins de prévenir la commission d'actes de terrorisme, si la visite révèle l'existence de documents, objets ou données relatifs à la menace d'une particulière gravité pour la sécurité et l'ordre publics que constitue le comportement de la personne concernée, il peut être procédé à leur saisie ainsi qu'à celle des données contenues dans tout système informatique ou équipement terminal présent sur les lieux de la visite soit par leur copie, soit par la saisie de leur support lorsque la copie ne peut être réalisée ou achevée pendant le temps de la visite. La copie des données ou la saisie des systèmes informatiques ou des équipements terminaux est réalisée en présence de l'officier de police judiciaire. Les éléments saisis sont conservés sous la responsabilité du chef du service ayant procédé à la visite. À compter de la saisie, nul n'y a accès avant l'autorisation du juge. Dès la fin de la visite, l'autorité administrative peut demander au juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Paris d'autoriser l'exploitation des données saisies. Au vu des éléments révélés par la visite, le juge statue dans un délai de quarante-huit heures à compter de sa saisine sur la régularité de la saisie et sur la demande de l'autorité administrative. Sont exclus de l'autorisation les éléments dépourvus de tout lien avec la finalité de prévention de la commission d'actes de terrorisme ayant justifié la visite.

    Les mesures précédemment indiquées, prises ou mises en œuvre par les autorités administratives en application des chapitres VI à IX du titre II du livre II du CSI (établissement de périmètres de protection, fermeture administrative des lieux de culte, mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance, visite et saisie) sont applicables jusqu'au 31 décembre 2020.  Elles font l'objet d'un contrôle parlementaire, commun à l'Assemblée nationale et au Sénat : obligation pour les autorités administratives de leur transmettre sans délai copie de tous les actes qu'elles prennent en application de ces dispositions ; possibilité pour l'Assemblée nationale et le Sénat de requérir toute information complémentaire dans le cadre du contrôle et de l'évaluation de ces mesures ; transmission chaque année par le Gouvernement au Parlement d'un rapport détaillé sur l'application de ces mesures (art. 5 insérant dans le titre II du livre II du CSI un chapitre X consacré au contrôle parlementaire, art. L. 22-10-1). 

    Les structures ayant pour objet ou activité la prévention et la lutte contre la radicalisation peuvent bénéficier de subventions, de la part de toute autorité administrative ou de tout organisme chargé de la gestion d'un service public industriel et commercial, pour mener les actions de prévention et de lutte contre la radicalisation qu'elles ont initiées et définies et qu'elles mettent en œuvre, dès lors que ces actions remplissent les conditions fixées par un cahier des charges arrêté par le ministre de l'intérieur (art. 6). L'octroi de ces subventions est subordonné à la conclusion d'une convention, à la production d'un compte rendu financier ainsi qu'au dépôt et à la publication de ces documents, dans les conditions prévues à l'article 10 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration.

    Si les nécessités de l'instruction d'un acte de terrorisme l'exigent, le juge d'instruction peut décider de ne pas faire figurer au dossier la décision du procureur de la République d'autoriser, sur demandes des OPJ et APJ, la prolongation des opérations d'instruction (art. 7 modifiant l'art. 706-24-2).

    Est incriminé non plus seulement le fait de révéler l'identité d'emprunt d'une personne mentionnée à l'article 132-78 du code pénal, c'est-à-dire d'un repenti, mais de révéler qu'une personne fait usage d'une identité d'emprunt ou de révéler tout élément permettant son identification ou sa localisation (art. 8 modifiant l'article 706-63-1 du code de procédure pénale). 

    Lorsque la comparution (d'un repenti) est susceptible de mettre gravement en danger sa vie ou son intégrité physique ou celle de ses proches, la juridiction de jugement peut, d'office ou à la demande de la personne faisant usage d'une identité d'emprunt en application du deuxième alinéa de l'article 706-63-1, ordonner le huis clos ou sa comparution dans des conditions de nature à préserver l'anonymat de son apparence physique, y compris en bénéficiant d'un dispositif technique mentionné à l'article 706-61 (audition à distance et en rendant la voix non identifiable) (art. 8 ajoutant l'art. 706-63-2 dans le code de procédure pénale). La juridiction de jugement statue à huis clos sur cette demande.

    La procédure prévue pour la criminalité et la délinquance organisées s'applique explicitement à l'enquête, la poursuite, l'instruction et le jugement des crimes et délits portant atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation (art. 9 complétant les art. 706-73 et 706-73-1 du code de procédure pénale).

    Une nouvelle incrimination est prévue en matière de terrorisme : le fait, par une personne ayant autorité sur un mineur, de faire participer ce mineur à un groupement formé ou à une entente établie en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, d'un des actes de terrorisme mentionnés aux articles 421-1 et 421-2 du code pénal est puni de quinze ans de réclusion criminelle et de 225 000 € d'amende (art. 10 insérant l'art. 421-2-4-1 dans le code de pénal). Lorsque le fait est commis par une personne titulaire de l'autorité parentale sur le mineur, la juridiction de jugement se prononce sur le retrait total ou partiel de l'autorité parentale en application des articles 378 et 379-1 du code civil. Elle peut alors statuer sur le retrait de l'autorité parentale en ce qu'elle concerne les autres enfants mineurs de cette personne. Si les poursuites ont lieu devant la cour d'assises, celle-ci statue sur cette question sans l'assistance des jurés. 

    Sont considérablement étoffées les dispositions portant sur les enquêtes administratives qui peuvent précéder les décisions administratives de recrutement, d'affectation, de titularisation (nouveau), d'autorisation, d'agrément ou d'habilitation, prévues par des dispositions législatives ou réglementaires, concernant soit les emplois publics participant à l'exercice des missions de souveraineté de l'Etat, soit les emplois publics ou privés relevant du domaine de la sécurité ou de la défense, soit les emplois privés ou activités privées réglementées relevant des domaines des jeux, paris et courses, soit l'accès à des zones protégées en raison de l'activité qui s'y exerce, soit l'utilisation de matériels ou produits présentant un caractère dangereux (art. 11 modifiant l'art. L. 114-1 du CSI). Il est désormais prévu par la loi que ces enquêtes peuvent donner lieu à la consultation de traitements automatisés de données à caractère personnel relevant de l'article 26 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, à l'exception des fichiers d'identification. Il peut également être procédé à de telles enquêtes administratives en vue de s'assurer que le comportement des personnes physiques ou morales concernées n'est pas devenu incompatible avec les fonctions ou missions exercées, l'accès aux lieux ou l'utilisation des matériels ou produits au titre desquels les décisions administratives précédemment mentionnées ont été prises. Lorsque le résultat de l'enquête fait apparaître que le comportement de la personne bénéficiant d'une décision d'autorisation, d'agrément ou d'habilitation est devenu incompatible avec le maintien de cette décision, il est procédé à son retrait ou à son abrogation, dans les conditions prévues par les dispositions législatives ou réglementaires qui lui sont applicables ou, à défaut, dans les conditions prévues au chapitre Ier du titre II du livre Ier du code des relations entre le public et l'administration. En cas d'urgence, l'autorisation, l'agrément ou l'habilitation peuvent être suspendus sans délai pendant le temps strictement nécessaire à la conduite de cette procédure. Lorsque le résultat de l'enquête fait apparaître que le comportement d'un fonctionnaire occupant un emploi participant à l'exercice de missions de souveraineté de l'État ou relevant du domaine de la sécurité ou de la défense est devenu incompatible avec l'exercice de ses fonctions, l'administration qui l'emploie procède à son affectation ou à sa mutation dans l'intérêt du service dans un emploi comportant l'exercice d'autres fonctions. En cas d'impossibilité de mettre en œuvre une telle mesure ou lorsque le comportement du fonctionnaire est incompatible avec l'exercice de toute autre fonction eu égard à la menace grave qu'il fait peser sur la sécurité publique, il est procédé à sa radiation des cadres. Ces décisions interviennent après mise en œuvre d'une procédure contradictoire. À l'exception du changement d'affectation, cette procédure inclut l'avis d'un organisme paritaire dont la composition et le fonctionnement sont fixés par décret en Conseil d'État. Lorsqu'il s'agit d'un agent contractuel de droit public, son employeur lui propose un emploi comportant l'exercice d'autres fonctions et correspondant à ses qualifications. En cas d'impossibilité de mettre en œuvre une telle mesure, en cas de refus de l'agent ou lorsque son comportement est incompatible avec l'exercice de toute autre fonction eu égard à la menace grave qu'il fait peser sur la sécurité publique, il est procédé, après mise en œuvre d'une procédure contradictoire, à son licenciement. Les décisions prises en application du présent IV, auxquelles l'article L. 411-2 du code des relations entre le public et l'administration n'est pas applicable (pas de recours administratif prolongeant le délai de recours contentieux), peuvent être contestées devant le juge administratif dans un délai de quinze jours à compter de leur notification et faire l'objet d'un appel et d'un pourvoi en cassation dans le même délai. Les juridictions saisies au fond statuent dans un délai de deux mois. En cas de recours, la décision contestée ne peut prendre effet tant qu'il n'a pas été statué en dernier ressort sur ce litige. L'employeur peut décider, à titre conservatoire, et pendant la durée strictement nécessaire à la mise en œuvre des suites données au résultat de l'enquête, d'écarter sans délai du service le fonctionnaire ou l'agent contractuel de droit public, avec maintien de son traitement, de l'indemnité de résidence, du supplément familial de traitement et des prestations familiales obligatoires. »

    Des dispositions comparables sont prévues pour les militaires et permettent de les écarter (radiation des cadres ou résiliation du contrat) au regard des résultats d'une enquête administrative (art. 11 complétant L. 4139-14 et insérant un article L. 4139-15-1 dans le code de la défense).

    Les contours du recours administratif préalable sont précisés en ce qui concerne les militaires : les recours contentieux formés par les militaires mentionnés à l'article L. 4111-2 à l'encontre d'actes relatifs à leur situation personnelle sont, à l'exception de ceux concernant leur recrutement ou l'exercice du pouvoir disciplinaire ou pris en application de l'article L. 4139-15-1, précédés d'un recours administratif préalable exercé dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État (art. 11 insérant l'art. L. 4125-1 dans le code de la défense).

    Le régime juridique permettant la consultation des données du fichier des passagers du transport aérien, grâce à la transposition de la directive européenne « Passenger Name Record » (PNR) est pérennisé et étendu aux données des agences de voyage (art. 12 abrogeant le II de l'article 17 de la loi n° 2013-1168 du 18 décembre 2013 relative à la programmation militaire pour les années 2014 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense et la sécurité nationale le prévoyant jusqu'au 31 décembre 2017). En d'autres termes, il s'agit du traitement automatisé de données à caractère personnel concernant les voyageurs des transports aériens. que le ministre de l'intérieur, le ministre de la défense, le ministre chargé des transports et le ministre chargé des douanes sont autorisés à mettre en œuvre pour les besoins de la prévention et de la constatation de certaines infractions, du rassemblement des preuves de ces infractions ainsi que de la recherche de leurs auteurs (art. 13 modifiant l'art. L. 232-7 CSI).

    A l'instar du PNR aérien, la création d'un traitement de données concernant les voyageurs des transporteurs maritimes (PNR maritime) est autorisée en des termes analogues à ceux concernant le transport aérien : "pour les besoins de la prévention et de la constatation de certaines infractions, du rassemblement des preuves de ces infractions ainsi que de la recherche de leurs auteurs" (art. 14 insérant l'article L. 232-7-1 dans le CSI).

Chapitre II Techniques de renseignement (art. 15 à 18)
    Un cadre juridique est établi pour les opérations de surveillance des communications hertziennes afin de tirer les conséquences de la décision du Conseil constitutionnel du 21 octobre 2017 (voir ci-dessous) (insertion dans le CSI: de l'art. L. 852-2 et d'un chapitre intitulé « Des mesures de surveillance de certaines communications hertziennes », art. L. 855-1 A à L. 855-1 C). .Les services de renseignement sont autorisés, aux seules fins de la défense et de la promotion des intérêts fondamentaux de la Nation, à procéder à l'interception et à l'exploitation des communications électroniques empruntant exclusivement la voie hertzienne et n'impliquant pas l'intervention d'un opérateur de communications électroniques lorsque cette interception et cette exploitation n'entrent dans le champ d'application d'aucune des techniques de renseignement prévues aux chapitres précédents du même titre. Les renseignements ainsi collectés sont détruits à l'issue d'une durée de six ans à compter de leur recueil. Pour ceux des renseignements qui sont chiffrés, le délai court à compter de leur déchiffrement. Ils ne peuvent être conservés plus de huit ans à compter de leur recueil. Les renseignements ne peuvent être transcrits ou extraits pour d'autres finalités que celles mentionnées à l'article L. 811-3. Les transcriptions ou les extractions doivent être détruites dès que leur conservation n'est plus indispensable à la poursuite des finalités mentionnées au même article L. 811-3. La Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement est informée du champ et de la nature des mesures prises en application du même article L. 855-1 A. Elle peut, à sa demande et à la seule fin de s'assurer du respect des champs d'application mentionnés au premier alinéa du présent article, se faire présenter sur place les capacités d'interception mises en œuvre sur le fondement dudit article L. 855-1 A et se faire communiquer les renseignements collectés conservés à la date de sa demande et les transcriptions et extractions réalisées. La commission peut, à tout moment, adresser au Premier ministre, ainsi qu'à la délégation parlementaire au renseignement, les recommandations et observations qu'elle juge nécessaires au titre du contrôle qu'elle exerce.

    Les observations que la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement adressent au Premier ministre en ce qui concerne les opérations de surveillance des communications hertziennes sont communiquées à la délégation parlementaire du renseignement, commune à l'Assemblée nationale et au Sénat (art. 16 complétant l'article  6 nonies de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires).

    L'application de l'art. L. 851-3 du code de la sécurité intérieure (accès administratif aux données de connexion "pour les seuls besoins de la prévention du terrorisme", mise en oeuvre sur les réseaux de traitement automatisés afin de détecter des connexions susceptibles de révéler une menace terroriste) est prolongée de deux ans (jusqu'au 31 décembre 2020) (art. 17 modifiant l'article 25 de la loi n° 2015-912 du 24 juillet 2015 relative au renseignement).

    Les militaires des unités des armées chargées des missions de défense militaire et les militaires des unités des armées chargées des missions d'action de l'État en mer sont autorisés, pour le seul exercice de ces missions, à mettre en œuvre les mesures prévues à l'article L. 855-1 A à C du code de la sécurité intérieure (art. 18 rétablissant l'art. L. 2371-1 dans le code de la défense). La Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement est informée du champ et de la nature des mesures de surveillance ainsi mises en œuvre. Par ailleurs, le service du ministère de la défense chargé de la qualification des appareils ou des dispositifs techniques mentionnés au 1° de l'article 226-3 du code pénal au profit des armées et des services du ministère de la défense et les militaires des unités des forces armées définies par arrêté sont autorisés à mettre en œuvre les mesures d'interception prévues à l'article L. 855-1 A du code de la sécurité intérieure, à la seule fin d'effectuer des essais de ces appareils et dispositifs et à l'exclusion de toute mesure d'exploitation des renseignements recueillis (art. 18 insérant l'art. L. 2371-2 dans le code de la défense).

Chapitre III Contrôles dans les zones frontalières (art. 19)
    Les possibilités de contrôle aux frontières sont renforcées de manière à accroître l'efficacité de l'action des services de police et de gendarmerie, notamment une fois passée la période de rétablissement des contrôles aux frontières (art. 19 modifiant l'article 78-2 du code de procédure pénale relatif aux contrôles d'identité et l'article 67 quater du code des douanes). La loi élargit ainsi les périmètres de contrôle, notamment aux abords des gares ouvertes au trafic international. Elle étend par ailleurs la durée possible du contrôle à « 12 heures consécutives » (contre 6 heures aujourd'hui). Elle prévoit aussi que dans un rayon maximal de dix kilomètres autour des ports et aéroports constituant des points de passage frontaliers au sens de l'article 2 du règlement (UE) 2016/399 du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2016 concernant un code de l'Union relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontières Schengen), désignés par arrêté en raison de l'importance de leur fréquentation et de leur vulnérabilité, l'identité de toute personne peut être contrôlée, pour la recherche et la prévention des infractions liées à la criminalité transfrontalière, en vue de vérifier le respect des obligations de détention, de port et de présentation des titres et documents prévus par la loi. L'arrêté précédemment mentionné fixe le rayon autour du point de passage frontalier dans la limite duquel les contrôles peuvent être effectués. Lorsqu'il existe une section autoroutière commençant dans la zone mentionnée à la même première phrase et que le premier péage autoroutier se situe au-delà des limites de cette zone, le contrôle peut en outre avoir lieu jusqu'à ce premier péage sur les aires de stationnement ainsi que sur le lieu de ce péage et les aires de stationnement attenantes. Les péages concernés par cette disposition sont désignés par arrêté. Le fait que le contrôle d'identité révèle une infraction autre que celle de non-respect des obligations susmentionnées ne constitue pas une cause de nullité des procédures incidentes. Le contrôle des obligations de détention, de port et de présentation des titres et documents prévus par la loi ne peut être pratiqué que pour une durée n'excédant pas douze heures consécutives dans un même lieu et ne peut consister en un contrôle systématique des personnes présentes ou circulant dans les zones. De même, dans les mêmes zones, pour la recherche et la prévention des infractions liées à la criminalité transfrontalière, les agents des douanes investis des fonctions de chef de poste ou les fonctionnaires désignés par eux titulaires du grade de contrôleur ou d'un grade supérieur peuvent vérifier le respect, par les personnes dont la nationalité étrangère peut être déduite d'éléments objectifs extérieurs à la personne même de l'intéressé, des obligations de détention, de port et de présentation des pièces ou documents prévus à l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile

Chapitre IV Dispositions relatives aux outre-mer (art. 20 et 21)
    Plusieurs articles du code de la sécurité intérieure et du code de la défense sont modifiés (art. 20). Il est indiqué que les articles 5 et 12 de la présente loi sont applicables en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Wallis-et-Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

    Lorsque la sécurité des agents des services internes de sécurité de la SNCF ou de la RATP est menacée, les images captées et enregistrées au moyen des caméras individuelles peuvent être transmises en temps réel au poste de commandement du service interne de sécurité concerné (art. 21 complétant l'article L. 2251-4-1 du code des transports).

Plan de la loi
Chapitre Ier Dispositions renforçant la prévention d'actes de terrorisme (art. 1er à 14)
Chapitre II Techniques de renseignement (art. 15 à 18)
Chapitre III Contrôles dans les zones frontalières (art. 19)
Chapitre IV Dispositions relatives aux outre-mer (art. 20 et 21)

Pas de saisine préalable du Conseil Constitutionnel

Rubrique :  défense, police, sécurité civile

Voir aussi :
Loi n° 2017-1154 du 11 juillet 2017 prorogeant l'application de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 relative à l'état d'urgence - Loi n° 55-385 du 3 avril 1955 relative à l'état d'urgence - CC 21 octobre 2016 La Quadrature du Net et autres [Surveillance et contrôle des transmissions empruntant la voie hertzienne] n° 2016-590 QPC - CE ass. gén. Avis 15 juin 2017 Projet de loi renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme n° 393348 - CC 29 mars 2018 M. Rouchdi B. et autre [Périmètres de protection, fermetures de lieux de culte, mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance, visites et saisies aux fins de lutte contre le terrorisme] n° 2017-695 QPC


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