Loi n° 2023-1059 du 20 novembre 2023 d'orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027 (Lien Legifrance, JO 21/11/2023)
La loi de 55 articles après la décision du Conseil constitutionnel (60 avant) contient outre des dispositions de programmation, de nombreuses dispositions portant sur la procédure pénale, y compris celle appliquée aux mineurs, et des dispositions sur l'administration pénitentiaire, sur la justice commerciale, l'institution judiciaire et des professions juridiques, ainsi que sur la justice administrative. Parmi les dispositions les plus marquantes on peut relever la place toujours plus importante des moyens électroniques et notamment des moyens de télécommunication audiovisuelle, la possibilité de réaliser des perquisitions de nuit et d'activer à distance des appareils électroniques à l'insu de leur propriétaire ou possesseur afin de procéder à sa localisation en temps réel, la nomination au sein des juridictions judiciaires d'attachés de justice et d'assistants spécialisés, la création de conseils de juridiction, ainsi que la possibilité pour l'administration pénitentiaire de faire appel à des surveillants adjoints recrutés en qualité de contractuels de droit public à durée déterminée.
Titre Ier : OBJECTIFS ET MOYENS DU MINISTÈRE DE LA JUSTICE (Article 1)
L'article 1er de la loi déférée approuve le rapport annexé définissant les orientations et la programmation des moyens du ministère de la justice entre 2023 et 2027, et retrace notamment l'évolution prévisionnelle sur cette période des crédits de paiement de la mission « Justice » du budget de l'État. Les crédits de paiement (hors compte d'affectation spéciale « Pensions ») , autrement dit le budget du ministère de la justice, de 8,9 Mds € en 2022, sont programmés pour passer de 9,6 Mds € en 2023 à 10,7 Mds € en 2027 (chiffres arrondis). Les créations nettes d'emplois du ministère de la justice sont fixées à 10 000 équivalents temps plein d'ici à 2027, dont 1 500 magistrats et 1 800 greffiers supplémentaires, y compris 605 équivalents temps plein recrutés en gestion pour l'année 2022 au titre de la justice de proximité.
Titre II : DISPOSITIONS RELATIVES À LA SIMPLIFICATION ET À LA MODERNISATION DE LA PROCÉDURE PÉNALE (Articles 2 à 25)
Chapitre Ier : Habilitation relative à la réécriture du code de procédure pénale (Articles 2 à 3)
L'article 2 autorise le Gouvernement à procéder par voie d'ordonnance à la réécriture de la partie législative du code de procédure pénale afin d'en clarifier la rédaction et le plan, ainsi qu'à la modification de toute autre disposition relevant du domaine de la loi rendue nécessaire par cette réécriture. Est ainsi autorisée la recodification, à droit constant, des dispositions législatives en vigueur au moment de la publication de l'ordonnance ou publiées mais non entrées en vigueur, les seules exceptions étant limitées dans leur portée et strictement définies par la loi.
L'article 3 modifie l'article 367 du code de procédure pénale relatif à la décision sur l'action publique.
Chapitre II : Dispositions améliorant le déroulement de la procédure pénale (Articles 4 à 25)
Section 1 : Dispositions relatives à l'enquête, à l'instruction, au jugement et à l'exécution des peines (Articles 4 à 24)
(Déclaré AC « cavalier législatif ») L'article 4 modifiait l'article 230-8 du code de procédure pénale afin de prévoir plusieurs adaptations portant sur la gestion du fichier des traitements d'antécédents judiciaires.
(Déclaré AC « cavalier législatif ») L'article 5 modifiait plusieurs articles du code de procédure pénale afin de remplacer le terme « race » par ceux de « prétendue race ».
L'article 6 est un long article qui modifie et complète principalement le code de procédure pénale (I) et de bien moindre façon le code de la justice pénale des mineurs (II), le code pénal (III) et le code pénitentiaire (IV).
L'article 6 (I 2°) insère au sein du code de procédure pénale un nouvel article 59-1 visant à permettre la réalisation de perquisitions de nuit dans le cadre d'une enquête de flagrance relative à certains crimes. Alors que l'article 56 du code de procédure pénale détermine les conditions selon lesquelles les perquisitions, visites domiciliaires et saisies peuvent être réalisées dans le cadre d'une enquête de flagrance et que l'article 59 prévoit que ces opérations ne peuvent être commencées avant 6 heures et après 21 heures, les dispositions ajoutées permettent de procéder, en dehors de ces heures, à des perquisitions, visites domiciliaires et saisies pour la recherche de certaines infractions : 1° Lorsque leur réalisation est nécessaire pour prévenir un risque imminent d'atteinte à la vie ou à l'intégrité physique ; « 2° Lorsqu'il existe un risque immédiat de disparition des preuves et des indices du crime qui vient d'être commis ; « 3° Pour permettre l'interpellation de la personne soupçonnée s'il est nécessaire de procéder à cette interpellation en dehors des heures prévues au même article 59 afin d'empêcher cette personne de porter atteinte à sa vie ou à celle des enquêteurs. L'autorisation est donnée par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire, à la requête du procureur de la République , par ordonnance spécialement motivée. Ces opérations ne peuvent, à peine de nullité, avoir un autre objet que la recherche et la constatation des infractions mentionnées dans la décision du juge des libertés et de la détention. Le fait que ces opérations révèlent des infractions autres ne constitue pas une cause de nullité des procédures incidentes.
L'article 6 (I 5 °) modifie l'article 63-3 du code de procédure pénale afin de prévoir que, sous certaines conditions, l'examen médical d'une personne placée en garde à vue peut être réalisé par un moyen de télécommunication audiovisuelle. En application de l'article 63-3 du code de procédure pénale, une personne placée en garde à vue peut, à sa demande, être examinée par un médecin. En cas de prolongation de cette mesure, elle peut demander à être examinée une seconde fois. Par ailleurs, à tout moment, le procureur de la République ou l'officier de police judiciaire peut, d'office, désigner un médecin pour l'examiner. Les dispositions ajoutées prévoient que, en cas de prolongation de la garde à vue, l'examen médical peut être réalisé par un moyen de télécommunication audiovisuelle sur autorisation du procureur de la République.
L'article 6 (I 10°) insère un article 97-2 prévoyant si les nécessités de l'information relative à l'un des crimes prévus au livre II du code pénal, autres que ceux relevant des articles 706-73 et 706-73-1 du présent code, l'exigent, que le juge d'instruction peut, lorsqu'il s'agit d'un crime flagrant, autoriser par ordonnance spécialement motivée que les perquisitions, les visites domiciliaires et les saisies de pièces à conviction soient opérées en dehors des heures prévues à l'article 59 dans les cas prévus aux 1° à 3° de l'article 59-1. Ces opérations ne peuvent, à peine de nullité, avoir un autre objet que la recherche et la constatation des infractions mentionnées dans la décision du juge d'instruction. Le fait que ces opérations révèlent des infractions autres ne constitue pas une cause de nullité des procédures incidentes.
L'article 6 (I 19°) insère au sein du code de procédure pénale un nouvel article 142-6-1 autorisant, sous certaines conditions, l'incarcération provisoire d'une personne mise en examen faisant l'objet d'un placement conditionnel sous assignation à résidence avec surveillance électronique afin de permettre la vérification de la faisabilité de cette mesure.
L'article 6 (I 33 °) insère au sein du code de procédure pénale un nouvel article 230-34-1 visant à permettre, dans le cadre d'une enquête ou d'une instruction, l'activation à distance d'appareils électroniques à l'insu de leur propriétaire ou possesseur afin de procéder à sa localisation en temps réel. L'activation à distance d'un appareil électronique ne peut, à peine de nullité, concerner les appareils électroniques utilisés par un membre du Parlement, un magistrat, un avocat, un journaliste, un commissaire de justice ou un médecin.
L'article 6 (I 45 °) insère au sein du code de procédure pénale un nouvel article 706-79-2 afin de prévoir que, lorsque la compétence de certaines juridictions pénales spécialisées s'exerce sur le ressort de juridictions situées en outre-mer, certains interrogatoires et débats peuvent être réalisés par un moyen de télécommunication audiovisuelle.
(Déclaré AC) L'article 6 (I 33 °) insérait au sein du code de procédure pénale de nouveaux articles 706-96-2 et 706-96-3 visant à permettre, dans le cadre d'une enquête ou d'une instruction, l'activation à distance d'appareils électroniques à l'insu de leur propriétaire ou possesseur afin de procéder à la sonorisation et à la captation d'images. L'inconstitutionnalité du 46° a entraîné, par voie de conséquence, du 47 ° du même paragraphe I, qui en est inséparable.
L'article 6 (I 48 °) complète l'article 803-5 du code de procédure pénale afin d'étendre les conditions dans lesquelles un interprète peut intervenir par l'intermédiaire de moyens de télécommunication au cours de l'audition libre ou de la garde à vue. L'intervention de l'interprète lors de la notification de ses droits ainsi que son assistance par un interprète peuvent se faire, par dérogation à l'article 706-71 et selon des modalités précisées par décret en Conseil d'Etat, par l'intermédiaire de moyens de télécommunication, dans des conditions garantissant la qualité, la confidentialité et la sécurité des échanges, notamment entre la personne et son avocat. Cela n'est pas applicable lorsque la personne placée en garde à vue est un majeur protégé.
L'article 7 modifie et complète le code de la justice pénale des mineurs par des dispositions procédurales.
(Déclaré AC « cavalier législatif ») L'article 8 modifiait l'article L. 241-2 du code de la justice pénale des mineurs afin d'autoriser la transmission des rapports éducatifs et des documents individuels de prise en charge entre les personnels des services et établissements de la protection judiciaire de la jeunesse et du secteur associatif habilité.
L'article 9 ajoute l'obligation de suivre une scolarité ou une formation ou d'exercer une activité professionnelle à la liste des obligations auxquelles le contrôle judiciaire astreint le mineur à se soumettre, selon la décision du juge des enfants, du tribunal pour enfants, du juge d'instruction ou du juge des libertés et de la détention.
(Déclaré AC « cavalier législatif ») L'article 10 modifiait l'article 41-1-2 du code de procédure pénale afin de rendre obligatoire l'assistance des personnes morales par un avocat pour la conclusion d'une convention judiciaire d'intérêt public.
L'article 12 modifie et complète l'article 114 du code de procédure pénale afin de prévoir qu'après chaque interrogatoire, chaque confrontation et chaque reconstitution, après que la personne mise en examen en a été informée verbalement, une copie du procès-verbal est immédiatement délivrée par tout moyen à son avocat.
L'article 15 complète l'article 343 du code de procédure pénale pour prévoir que lorsque l'accusé comparaît détenu, l'audience de renvoi doit être fixée dans les plus brefs délais, sans préjudice de la possibilité pour l'accusé de demander, à tout moment, sa remise en liberté.
L'article 18 insère dans code de procédure pénale un article 803-10 qui assimile les représentants au Parlement européen élus en France aux députés et aux sénateurs pour les dispositions interdisant à leur égard l'introduction à leur insu dans un lieu privé ou un véhicule afin d'implanter de dispositifs de géolocalisation, de sonorisation et de captation d'images, ou de captation de données informatiques et l'activation à distance d'appareils électroniques à l'insu de leur propriétaire ou possesseur afin de procéder à sa localisation en temps réel.
L'article 19 complète l'article 2-1 du code de procédure pénale pour étendre la capacité d'exercer les droits reconnus à la partie civile admise à toute association régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans à la date des faits, se proposant par ses statuts de combattre le racisme ou d'assister les victimes de discrimination fondée sur leur origine nationale, ethnique, raciale ou religieuse en ce qui concerne les destructions ou dégradations de monuments ou les violations de sépultures, lorsqu'elles ont été commises avec circonstance aggravante.
(Déclaré AC « cavalier législatif ») L'article 20 modifiait l'article 41-1-3 du code de procédure pénale relatif à la procédure de convention judiciaire d'intérêt public en matière environnementale, afin de prévoir que le suivi des obligations qui peuvent être imposées au titre d'une telle convention est assuré sous la direction du procureur de la République.
L'article 21 complète l'article 41-4 du code de procédure pénale pour indiquer que, par dérogation, dans le cadre de crimes non élucidés la destruction des scellés est interdite jusqu'à l'expiration d'un délai de dix ans à compter de l'acquisition de la prescription de l'action publique.
L'article 22 modifie l'article 689-11 du code de procédure pénale relatif à la compétence des juridictions pénales françaises pour les crimes commis hors du territoire de la République s'agissant de la condition d'une résidence habituelle sur le territoire français .
L'article 24 modifie l'article 131-8 du code pénal afin d'étendre le champ des personnes morales au profit desquelles un travail d'intérêt général (TIG) peut être réalisé. Ces dispositions prévoient que ce travail peut être réalisé au profit d'une personne morale de droit privé remplissant les conditions définies à l'article 1er de la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire poursuivant une utilité sociale et habilitée à mettre en œuvre des travaux d'intérêt général. L'article 24 proroge pour trois ans la durée de l'expérimentation prévue au XIX de l'article 71 de la loi n° 2019-22 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, relative à la réalisation du travail d'intérêt général prévu à l'article 131-8 du code pénal et du travail non rémunéré prévu à l'article 41-2 du code de procédure pénale au profit de sociétés dont les statuts définissent une mission qui assigne à la société la poursuite d'objectifs sociaux et environnementaux.
Section 2 : Dispositions améliorant l'indemnisation des victimes (Article 25)
L'article 25 modifie l'article 706-3 du code de procédure pénale pour étendre le recours ouvert aux victimes de dommages résultant de certaines infractions aux faits commis sur un mineur ou par le conjoint ou le concubin de la victime, par le partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité, par un ancien conjoint ou concubin de la victime ou par un ancien partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité . L'article 25 complète l'article 706-5 du même code pour prévoir que lorsque l'infraction est commise à l'encontre d'un mineur, le délai de forclusion ne court qu'à compter de la majorité de ce dernier. Il modifie la rédaction de l'article 706-14-2 du même code pour prévoir les conditions d'attribution d'une aide financière victimes à l'étranger de faits présentant le caractère matériel d'une infraction.
Titre III : DISPOSITIONS RELATIVES À LA JUSTICE COMMERCIALE ET AUX JUGES NON PROFESSIONNELS (Articles 26 à 36)
Chapitre Ier : Diverses dispositions portant expérimentation d'un tribunal des activités économiques (Articles 26 à 27)
L'article 26 prévoit, à titre expérimental, que, dans certains ressorts, la compétence du tribunal de commerce, renommé « tribunal des activités économiques », est étendue en matière de procédures collectives à tous les débiteurs, à l'exception de certaines professions libérales réglementées, et précise sa composition. Les modalités de cette expérimentation sont précisées.
L'article 27 instaure, dans le cadre de cette expérimentation, une contribution pour la justice économique devant être versée par la partie demanderesse à peine d'irrecevabilité.
Chapitre II : Dispositions relatives à la formation et à la responsabilité des juges non professionnels (Articles 28 à 36)
Les articles 28 à 32 modifient et complètent des dispositions du code du travail relatives aux conditions d'exercice des fonctions de conseiller prud'homme. Est inséré dans ce code un article L. 1421-3 obligeant dans un délai de six mois à compter de leur installation, les conseillers prud'hommes à remettre une déclaration exhaustive, exacte et sincère de leurs intérêts. Est également inséré dans ce code un article L. 1442-14-1 prévoyant que la cessation des fonctions d'un conseiller prud'homme pour quelque cause que ce soit ne fait pas obstacle à l'engagement de poursuites et au prononcé de sanctions disciplinaires qui peuvent être l'interdiction d'exercer les fonctions de conseiller prud'homme pour une durée maximale de dix ans ou l'interdiction définitive d'exercer les fonctions de conseiller prud'homme.
L'article 33 modifie le code du commerce quant aux conditions d'exercice des juges des tribunaux de commerce, notamment en ce qui concerne l'exigence de formation.
Les articles 34 à 36 modifient et complètent le code de l'organisation judiciaire. Ainsi, l'article L. 218-12 de ce code est complété pour indiquer que tout assesseur qui n'a pas satisfait à l'obligation de formation initiale dans un délai fixé par décret est réputé démissionnaire. Est inséré dans le même code un article L. 218-13 disposant que tout assesseur qui, sans motif légitime et après mise en demeure, refuse de remplir le service auquel il est appelé peut être déclaré démissionnaire dans des conditions prévues par décret en Conseil d'Etat.
Titre IV : OUVERTURE ET MODERNISATION DE L'INSTITUTION JUDICIAIRE (Articles 37 à 43)
Chapitre Ier : Juridictions judiciaires (Articles 37 à 39)
L'article 37 modifie plusieurs dispositions du code de l'organisation judiciaire et du code de procédure pénale afin de permettre la nomination au sein des juridictions judiciaires d'attachés de justice et d'assistants spécialisés qui participent au traitement des procédures civiles et pénales. Ces dispositions permettent de nommer au sein des juridictions, d'une part, des attachés de justice afin d'exercer auprès des magistrats des fonctions d'assistance, d'aide à la décision et de soutien à l'activité administrative ainsi qu'à la mise en œuvre des politiques publiques, et, d'autre part, des assistants spécialisés afin de participer au traitement de procédures relevant de contentieux techniques ou spécifiques. Les conditions d'entrée en vigueur de l'article 37 sont précisées par les articles 59 et 60.
L'article 38 insère dans le code de l'organisation judiciaire et le code de justice administrative des dispositions mettant en place auprès des tribunaux judiciaires et des cours d'appel, d'une part, et des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, d'autre part, un conseil de juridiction, lieu d'échanges et de communication entre la juridiction et la cité, dont les missions, la composition, l'organisation et le fonctionnement sont fixés par décret en Conseil d'Etat. Les députés et les sénateurs élus dans une circonscription située dans le ressort de la juridiction sont invités à participer au conseil de juridiction. Le conseil de juridiction n'exerce aucun contrôle sur l'activité juridictionnelle ou sur l'organisation de la juridiction. Il n'évoque pas les affaires individuelles dont la juridiction est saisi.
L'article 39 contient une disposition de coordination.
Chapitre II : Juridictions disciplinaires des officiers ministériels et des avocats (Articles 40 à 42)
L'article 40 modifie et complète l'ordonnance n° 2022-544 du 13 avril 2022 relative à la déontologie et à la discipline des officiers ministériels pour prévoir notamment que si, dans un délai de cinq ans à compter du prononcé de la peine, le professionnel a commis un manquement ayant entraîné le prononcé d'une nouvelle peine d'amende, celle-ci entraîne, sauf décision motivée, l'exécution de la première peine d'amende sans confusion avec la seconde. L'article 40 modifie et complète aussi la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques.
L'article 41 complète la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 pour instituer un conseil de discipline commun dans le ressort des cours d'appel de Cayenne, de Fort-de-France et de Basse-Terre pour connaître des infractions et des fautes commises par les avocats relevant des barreaux de la Guyane, de la Martinique et de la Guadeloupe, Saint-Martin et Saint-Barthélemy.
Chapitre III : Administration pénitentiaire (Article 43)
L'article 43 complète le code pénitentiaire, d'une part, par un article L. 113-4-1 prévoyant que pour assurer des missions d'appui et d'accompagnement des membres du corps d'encadrement et d'application du personnel de surveillance de l'administration pénitentiaire, l'Etat peut faire appel à des surveillants adjoints, âgés d'au moins dix-huit ans et de moins de trente ans, recrutés en qualité de contractuels de droit public pour une période de trois ans, renouvelable une fois par reconduction expresse. Les surveillants adjoints sont placés sous la responsabilité hiérarchique du chef d'établissement. Différentes missions leur sont confiées, notamment au contact de la population pénale. Certaines d'entre elles sont exercées en binôme avec un surveillant pénitentiaire titulaire. D'autre part, l'article 43 ajoute dans le même code une section consacrée à l'utilisation de caméras individuelles (art. L. 223-20). Pour les missions présentant, en raison de leur nature ou du niveau de dangerosité des personnes détenues concernées, un risque particulier d'incident ou d'évasion, les personnels de surveillance de l'administration pénitentiaire individuellement désignés peuvent être autorisés à procéder, au moyen de caméras individuelles, à un enregistrement audiovisuel de leurs interventions lorsqu'un incident se produit ou est susceptible de se produire, eu égard aux circonstances de l'intervention ou au comportement des personnes concernées. L'article 43 pérennise ainsi l'expérimentation prévue par l'article 2 de la loi n° 2018-697 du 3 août 2018 relative à l'harmonisation de l'utilisation des caméras mobiles par les autorités de sécurité publique qui est abrogé par voie de conséquence. Enfin, l'article 40 complète le code pénitentiaire par un article L. 231-4 permettant, sous réserve du consentement de la personne détenue à la mesure proposée et dans des conditions déterminées par décret en Conseil d'Etat, que certains manquements au règlement intérieur mentionné à l'article L. 112-4, au présent code, au code de procédure pénale ou aux instructions de service peuvent donner lieu à la mise en œuvre d'une procédure alternative aux poursuites disciplinaires.
Titre V : DISPOSITIONS RELATIVES AU DROIT CIVIL ET AUX PROFESSIONS DU DROIT (Articles 44 à 51)
Chapitre Ier : Transfert de compétences civiles du juge des libertés et de la détention (Article 44)
L'article 44 modifie diverses dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, du code de la santé publique, du code de l'organisation judiciaire et du code de procédure pénale afin de confier aux magistrats du siège des tribunaux judiciaires certaines compétences du juge des libertés et de la détention. Ces nouvelles dispositions prévoient que les compétences confiées au juge des libertés et de la détention par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en matière de placement et maintien en zone d'attente, de rétention administrative et d'assignation à résidence d'un étranger, ainsi que par le code de la santé publique, en matière de mise en quarantaine, de placement et maintien à l'isolement et d'hospitalisation sans consentement, peuvent désormais être exercées par un magistrat du siège du tribunal judiciaire.
Chapitre II : Diverses dispositions portant modernisations processuelles et relatives aux professions du droit (Articles 45 à 51)
L'article 47 modifie plusieurs articles du livre II du code des procédures civiles d'exécution afin de réformer la procédure de saisie des rémunérations en confiant désormais son exécution à un commissaire de justice. Par voie de conséquence, la compétence du juge de l'exécution pour autoriser la saisie des rémunérations est supprimée. Ainsi, ces dispositions permettent que la saisie des rémunérations puisse avoir lieu par l'intermédiaire de l'employeur du débiteur, sans que ne soit plus requise l'intervention du juge et ne laissent qu'un délai d'un mois au débiteur pour former un recours ayant un effet suspensif. L'article 47 entre en vigueur à une date fixée par décret, et au plus tard le 1er juillet 2025.
L'article 48 modifie le paragraphe II de l'article 16 de la loi du 23 mars 2019 relatif à la légalisation des actes publics établis par une autorité étrangère. En vertu des dispositions ajoutées, sauf engagement international contraire, tout acte public établi par une autorité étrangère et destiné à être produit en France doit être légalisé pour y produire effet. Elles prévoient en outre qu'un décret en Conseil d'État précise les actes publics concernés par cette obligation et définit les modalités de la légalisation.
L'article 49 modifie la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques pour fixer le niveau d'accès à la profession d'avocat à un master en droit (au lieu d'une maîtrise en droit) en correspondance avec les diplômes désormais délivrés. Toutefois, les étudiants en droit d'un niveau bac +4 pourront continuer de passer l'examen du centre régional de formation professionnelle des avocats (CRFPA) puisque pour être admis à se présenter à l'examen d'accès au centre régional de formation professionnelle, les candidats doivent seulement justifier de l'obtention des soixante premiers crédits d'un master en droit ou de l'un des titres ou diplômes reconnus comme équivalents. Les conditions d'entrée en vigueur de l'article 49 sont précisées par les articles 59 et 60. (Déclaré AC « cavalier législatif ») Le paragraphe IV de l'article 49 insérait dans la loi du 31 décembre 1971 un article 58-1 visant à prévoir les conditions dans lesquelles est assurée la confidentialité des consultations juridiques réalisées par un juriste d'entreprise.
L'article 51 habilite le Gouvernement à prendre par voie d'ordonnance, au plus tard le 30 juin 2024, les mesures relevant du domaine de la loi portant sur la publicité foncière. Les finalités sont notamment : 1° Améliorer la lisibilité du droit de la publicité foncière, notamment en réunissant et en adaptant, au sein du même livre du code civil, l'ensemble des règles relatives à la publicité foncière ; 2° Moderniser le régime de la publicité foncière et renforcer son efficacité ; 3° Moderniser et clarifier le régime de l'inscription des privilèges immobiliers et des hypothèques.
Titre VI : DISPOSITIONS DIVERSES RELATIVES AUX JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES ET FINANCIÈRES ET À LA RESPONSABILITÉ DES GESTIONNAIRES PUBLICS (Articles 52 à 57)
L'article 52 complète le code de justice administrative par un article L. 12 instituant la prestation de serment publique avant l'entrée en fonctions des membres du Conseil d'Etat et des magistrats des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel. Ainsi, ils doivent prêter serment publiquement, devant le vice-président du Conseil d'Etat ou son représentant, de remplir leurs fonctions en toute indépendance, probité et impartialité, de garder le secret des délibérations et de se conduire en tout avec honneur et dignité. Ils ne peuvent être relevés de leur serment.
L'article 53 modifie le code des juridictions financières en ce qui concerne l'exercice des fonctions par les magistrats de la Cour des comptes et des chambres régionales des comptes et leur carrière.
L'article 54 ratifie l'ordonnance n° 2022-408 du 23 mars 2022 relative au régime de responsabilité financière des gestionnaires publics et donne qualité à l'agence française anticorruption pour déférer au ministère public près la Cour des comptes des faits susceptibles de constituer des infractions.
L'article 55 ajoute dans le code de justice administrative et le code des juridictions financières des dispositions permettant d'étendre aux magistrats administratifs et aux magistrats financiers les stipulations d'un accord relatif à la protection sociale complémentaire et conclu au niveau national pour la fonction publique de l'État. Cette extension, en tout ou partie, aux membres du Conseil d'Etat, intervient dans des conditions prévues par décret en Conseil d'Etat.
L'article 56 modifie le code de l'action sociale et des familles, le code de la santé publique et le code de la sécurité sociale pour supprimer la compétence des tribunaux interrégionaux de la tarification sanitaire et sociale et la remplacer par celle des tribunaux administratifs et de la cour administrative d'appel désignés par décret en Conseil d'Etat.
Titre VII : DISPOSITIONS TRANSITOIRES ET FINALES (Articles 58 à 60)
L'article 58 contient de très nombreuses dispositions de coordination.
L'article 59 précise les conditions d'entrée en vigueur des articles 37 et 49.
L'article 60 détaille les conditions d'entrée en vigueur des dispositions de la loi.
SOMMAIRE
Titre Ier : OBJECTIFS ET MOYENS DU MINISTÈRE DE LA JUSTICE (Article 1)
Titre II : DISPOSITIONS RELATIVES À LA SIMPLIFICATION ET À LA MODERNISATION DE LA PROCÉDURE PÉNALE (Articles 2 à 25)
Chapitre Ier : Habilitation relative à la réécriture du code de procédure pénale (Articles 2 à 3)
Chapitre II : Dispositions améliorant le déroulement de la procédure pénale (Articles 4 à 25)
Section 1 : Dispositions relatives à l'enquête, à l'instruction, au jugement et à l'exécution des peines (Articles 4 à 24)
Section 2 : Dispositions améliorant l'indemnisation des victimes (Article 25)
Titre III : DISPOSITIONS RELATIVES À LA JUSTICE COMMERCIALE ET AUX JUGES NON PROFESSIONNELS (Articles 26 à 36)
Chapitre Ier : Diverses dispositions portant expérimentation d'un tribunal des activités économiques (Articles 26 à 27)
Chapitre II : Dispositions relatives à la formation et à la responsabilité des juges non professionnels (Articles 28 à 36)
Titre IV : OUVERTURE ET MODERNISATION DE L'INSTITUTION JUDICIAIRE (Articles 37 à 43)
Chapitre Ier : Juridictions judiciaires (Articles 37 à 39)
Chapitre II : Juridictions disciplinaires des officiers ministériels et des avocats (Articles 40 à 42)
Chapitre III : Administration pénitentiaire (Article 43)
Titre V : DISPOSITIONS RELATIVES AU DROIT CIVIL ET AUX PROFESSIONS DU DROIT (Articles 44 à 51)
Chapitre Ier : Transfert de compétences civiles du juge des libertés et de la détention (Article 44)
Chapitre II : Diverses dispositions portant modernisations processuelles et relatives aux professions du droit (Articles 45 à 51)
Titre VI : DISPOSITIONS DIVERSES RELATIVES AUX JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES ET FINANCIÈRES ET À LA RESPONSABILITÉ DES GESTIONNAIRES PUBLICS (Articles 52 à 57)
Titre VII : DISPOSITIONS TRANSITOIRES ET FINALES (Articles 58 à 60)
Annexe : Rapport
DECISION DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL
Dans sa décision n° 2023-855 DC du 16 novembre 2023, le conseil constitutionnel a décidé :
Sont contraires à la Constitution les dispositions suivantes de la loi d'orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027 :
• les articles 4 et 5 ;
• les 46 ° et 47 ° du paragraphe I de l'article 6 ;
• les articles 8, 10 et 20 ;
• le paragraphe IV de l'article 49.
Sous les réserves énoncées ci-dessous, sont conformes à la Constitution les dispositions suivantes :
• sous la réserve énoncée au paragraphe 28, l'article 59-1 du code de procédure pénale, dans sa rédaction issue de l'article 6 de la loi déférée ;
• sous la réserve énoncée au paragraphe 50, l'article 142-6-1 du code de procédure pénale, dans sa rédaction issue de l'article 6 de la loi déférée ;
• sous les réserves énoncées aux paragraphes 78 et 81, l'article 706-79-2 du code de procédure pénale, dans sa rédaction issue de l'article 6 de la loi déférée ;
• sous la réserve énoncée au paragraphe 88, les quatrième et cinquième alinéas de l'article 803-5 du code de procédure pénale, dans sa rédaction résultant de l'article 6 de la loi déférée ;
• sous la réserve énoncée au paragraphe 126, l'article L. 212-8 du code des procédures civiles d'exécution, dans sa rédaction issue de l'article 47 de la loi déférée.
Sont conformes à la Constitution les dispositions suivantes de la même loi :
• l'article 2 ;
• les cinquième à treizième alinéas de l'article 63-3 du code de procédure pénale, dans sa rédaction résultant de l'article 6 de la loi déférée ;
• l'article 230-34-1 du code de procédure pénale, dans sa rédaction issue de l'article 6 de la loi déférée ;
• la seconde phrase du premier alinéa de l'article 131-8 du code pénal, dans sa rédaction résultant de l'article 24 de la loi déférée ;
• les deux premiers alinéas du paragraphe I de l'article 26 de la loi déférée, le paragraphe III de ce même article, ainsi que le premier et les trois derniers alinéas de l'article 27 de la même loi ;
• l'article L. 123-4 du code de l'organisation judiciaire, dans sa rédaction résultant de l'article 37 de la loi déférée, et l'article L. 123-5 du même code, dans sa rédaction issue de l'article 37 de la même loi ;
• l'article 803-9 du code de procédure pénale, dans sa rédaction issue de l'article 37 de la loi déférée ;
• l'article 44 de la loi déférée ;
• le paragraphe III de l'article 47 de la loi déférée ;
• l'article L. 212-4 du code des procédures civiles d'exécution, dans sa rédaction issue de l'article 47 de la loi déférée ;
• les premier et dernier alinéas du paragraphe II de l'article 16 de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, dans sa rédaction résultant de l'article 48 de la loi déférée.
La loi a fait l'objet d'un rectificatif : LOI n° 2023-1059 du 20 novembre 2023 d'orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027 (rectificatif)
Rubriques : droit, justice et professions juridiques / pénal et pénitentiaire / droits civils, famille, dons et legs / contentieux / travail et emploi