Loi n° 2023-630 du 20 juillet 2023 visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs de lutte contre l'artificialisation des sols et à renforcer l'accompagnement des élus locaux (Lien Legifrance, JO 21/07/2023)

    Issue d'une proposition parlementaire la loi comprend neuf articles répartis en quatre titres. Elle modifie principalement l'article 194 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (loi dite Climat et résilience) mais aussi le code général des collectivités territoriales et le code de l'urbanisme.

Chapitre Ier : Favoriser le dialogue territorial et renforcer la gouvernance décentralisée (Articles 1 à 2)
    L'article 1 modifie le IV de l'article 194 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 précitée. pour faire passer de trente à trente neuf mois à compter de la publication de cette loi le délai pour intégrer les objectifs de réduction de l'artificialisation dans les documents d'urbanisme locaux suivants : schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET), plan d'aménagement et de développement durable de Corse, schéma d'aménagement régional et schéma directeur de la région d'Île-de-France. Il allonge également de six mois les délais d'entrée en vigueur du schéma de cohérence territoriale, du plan local d'urbanisme ou de la carte communale.
    Ce même article 1 complète l'article 194 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 précitée par un IV bis disposant que dans la collectivité de Corse, à compter du 22 août 2027, l'extension de l'urbanisation est interdite dans toute commune qui n'est pas couverte par un plan local d'urbanisme, un document en tenant lieu ou une carte communale.

    L'article 2 insère l'article L. 1111-9-1 dans le code général des collectivités territoriales en substitution du V de l'article 194 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 abrogé. Il institue, dans chaque région, une conférence régionale de gouvernance de la politique de réduction de l'artificialisation des sols ("conférence ZAN"; ZAN pour zéro artificialisation nette). La composition et le nombre de membres de la conférence régionale sont déterminés par une délibération du conseil régional prise sur avis conforme de la majorité des organes délibérants des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre compétents en matière de plan local d'urbanisme et des conseils municipaux des communes n'ayant pas transféré la compétence en matière de plan local d'urbanisme. A l'initiative de la région ou d'un établissement public mentionné à l'article L. 143-16 du code de l'urbanisme appartenant au périmètre régional, la conférence régionale de gouvernance de la politique de réduction de l'artificialisation des sols peut se réunir sur tout sujet lié à la mise en œuvre des objectifs de réduction de l'artificialisation des sols. Elle peut également transmettre à l'Etat des analyses et des propositions portant sur cette mise en œuvre. En tant que de besoin, elle peut consulter les personnes publiques associées mentionnées, selon les cas, aux articles L. 4251-5, L. 4424-13 et L. 4433-10 du présent code et à l'article L. 123-7 du code de l'urbanisme. Elle est consultée dans le cadre de la qualification des projets d'envergure nationale ou européenne et également dans le cadre de la qualification des projets d'envergure régionale mentionnés au 6° de l'article L. 141-8 du code de l'urbanisme. Dans ce cas, les représentants de l'Etat mentionnés au 7° du I du présent article ne siègent pas au sein de la conférence. Le président ou la majorité des membres de la conférence régionale de gouvernance de la politique de réduction de l'artificialisation des sols peut décider de réunir une conférence départementale pour tout sujet lié à la mise en œuvre communale ou intercommunale des objectifs de réduction de l'artificialisation des sols.

Chapitre II : Accompagner les projets structurants de demain (Article 3)
    L'article 3 complète le III de l'article 194 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 précitée par un 7° pour détailler les projets qui peuvent être considérés comme des projets d'envergure nationale ou européenne et par un 8° pour prévoir qu'un arrêté du ministre chargé de l'urbanisme recense les projets dont la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers est prise en compte au niveau national au sens du III bis du présent article, après avis du président du conseil régional et consultation de la "conférence ZAN".
    Ce même article 3 insère après le III de l'article 194 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 précitée, les III bis à III quater pour prévoir que pour la première tranche de dix années mentionnée au III, la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers résultant des projets d'envergure nationale ou européenne qui présentent un intérêt général majeur recensés dans l'arrêté ministériel mentionné au 8° du même III est prise en compte au niveau national et n'est pas prise en compte au titre des objectifs fixés par les documents de planification régionale et par les documents d'urbanisme. En vue d'atteindre l'objectif mentionné à l'article 191, cette consommation est prise en compte dans le cadre d'un forfait national fixé à hauteur de 12 500 hectares pour l'ensemble du pays, dont 10 000 hectares sont mutualisés entre les régions couvertes par un schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires, au prorata de leur enveloppe d'artificialisation définie au titre de la période 2021-2031 en application du 3° du III du présent article. Un arrêté du ministre chargé de l'urbanisme précise cette répartition. En cas de dépassement du forfait, le surcroît de consommation ne peut être imputé sur l'enveloppe des collectivités territoriales ou de leurs groupements. Une commission régionale de conciliation sur l'artificialisation des sols est instituée dans chaque région. Elle comprend notamment, à parts égales, des représentants de l'Etat et de la région concernée. Elle peut être saisie à la demande de la région, en cas de désaccord sur la liste des projets d'envergure nationale ou européenne présentant un intérêt général majeur mentionnés au 8° du III. Les aménagements, les équipements et les logements directement liés à la réalisation d'un projet d'envergure nationale ou européenne qui présente un intérêt général majeur peuvent être considérés, en raison de leur importance, comme des projets d'envergure régionale, au sens du 6° de l'article L. 141-8 du code de l'urbanisme, ou comme des projets d'intérêt intercommunal, au sens du 7° du même article L. 141-8, auxquels cas l'artificialisation des sols ou la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers qui en résulte est prise en compte selon les modalités propres à ces projets.

Chapitre III : Mieux prendre en compte les spécificités des territoires (Articles 4 à 5)
    L'article 4 complète le III de l'article 194 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 précitée, par un 3° bis prévoyant qu'une commune qui est couverte par un plan local d'urbanisme, par un document en tenant lieu ou par une carte communale prescrit, arrêté ou approuvé avant le 22 août 2026 ne peut être privée, par l'effet de la déclinaison territoriale des objectifs mentionnés au présent article, d'une surface minimale de consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers. Pour la première tranche de dix années, cette surface minimale est fixée à un hectare. Au plus tard le 1er janvier 2031, la conférence régionale ZAN présente un bilan de l'application de la surface minimale de consommation d'espaces agricoles, naturels et forestiers dans le cadre de la fixation d'objectifs communaux, intercommunaux et régionaux de réduction de l'artificialisation des sols applicables à la première période décennale, de son adéquation avec les besoins fonciers constatés durant la période et de l'artificialisation constatée durant cette même période. Elle formule des pistes de réduction de cette surface minimale pour les périodes décennales ultérieures, en vue d'atteindre l'objectif d'absence d'artificialisation nette à l'horizon 2050.

    L'article 5 insère dans le code de l'environnement, un article L. 321-15-1 prévoyant que pour la fixation des objectifs chiffrés de lutte contre l'artificialisation des sols dans les documents de planification régionale et d'urbanisme, il est tenu compte des enjeux d'adaptation et de recomposition spatiale du territoire des communes figurant sur la liste - mentionnée à l'article L. 321-15 - établie par décret des communes dont l'action en matière d'urbanisme et la politique d'aménagement doivent être adaptées aux phénomènes hydrosédimentaires entraînant l'érosion du littoral, autrement dit les communes exposées au recul du trait de côte. Pour l'atteinte des objectifs précités, les surfaces artificialisées situées dans une zone exposée au recul du trait de côte délimitée peuvent être considérées comme désartificialisées dès lors que ces surfaces ont vocation à être renaturées dans le cadre d'un projet de recomposition spatiale du territoire littoral. Au terme de chaque tranche de dix années, les surfaces n'ayant pas fait l'objet d'une renaturation sont de nouveau considérées comme artificialisées.

Chapitre IV : Prévoir les outils pour faciliter la transition vers l'absence de toute artificialisation nette des sols (Articles 6 à 9)
    L'article 6 insère dans le code de l'urbanisme un article L. 211-1-1 donnant à l'autorité compétente, par délibération motivée, la faculté de délimiter au sein du plan local d'urbanisme, du document en tenant lieu ou de la carte communale des secteurs prioritaires à mobiliser qui présentent un potentiel foncier majeur pour favoriser l'atteinte des objectifs de lutte contre l'artificialisation des sols prévus en application de l'article L. 151-5, à l'intérieur desquels est institué le droit de préemption urbain. Les articles L. 210-1 et L. 213-1 à L. 213-18 s'appliquent également. Ces secteurs prioritaires peuvent couvrir en particulier : 1° Des terrains contribuant à la préservation ou à la restauration de la nature en ville, notamment lorsqu'il s'agit de surfaces végétalisées ou naturelles situées au sein des espaces urbanisés ; 2° Des zones présentant un fort potentiel en matière de renaturation, en particulier dans le cadre de la préservation ou de la restauration des continuités écologiques, et qui peuvent notamment être les zones préférentielles pour la renaturation identifiées dans le schéma de cohérence territoriale ; 3° Des terrains susceptibles de contribuer au renouvellement urbain, à l'optimisation de la densité des espaces urbanisés ou à la réhabilitation des friches.
    Le même article 6 complète le IV de l'article 194 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 par un 14° prévoyant que dans le cadre de la mise en œuvre des objectifs mentionnés au présent article, l'autorité compétente pour délivrer les autorisations d'urbanisme peut surseoir à statuer sur une demande d'autorisation d'urbanisme entraînant une consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers qui pourrait compromettre l'atteinte des objectifs de réduction de cette consommation susceptibles d'être fixés par le document d'urbanisme en cours d'élaboration ou de modification, durant la première tranche de dix années mentionnée au 1° du III. La décision de surseoir à statuer est motivée en considération soit de l'ampleur de la consommation résultant du projet faisant l'objet de la demande d'autorisation, soit de la faiblesse des capacités résiduelles de consommation au regard des objectifs de réduction mentionnés au début. La décision de surseoir à statuer ne peut être opposée à une demande pour laquelle la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers résultant de la réalisation du projet est compensée par la renaturation, d'une surface au moins équivalente à l'emprise du projet.
Le sursis à statuer ne peut être ni prononcé, ni prolongé après l'approbation du document d'urbanisme modifié en application du présent IV. A l'expiration du délai de validité du sursis à statuer, l'autorité statue sur la demande d'autorisation d'urbanisme dans un délai de deux mois à compter de la confirmation par le pétitionnaire de cette demande. A défaut de notification de la décision dans ce dernier délai, l'autorisation est considérée comme ayant été accordée dans les termes dans lesquels elle avait été demandée.

    L'article 7 complète le 5° du III de l'article 194 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 précitée pour indiquer que sur un territoire, la transformation effective d'espaces urbanisés ou construits en espaces naturels, agricoles et forestiers du fait d'une renaturation peut être comptabilisée en déduction de cette consommation.

    L'article 8 modifie l'article 207 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 précitée pour compléter le compléter le contenu que doit comporter le rapport relatif à l'évaluation de la politique de limitation de l'artificialisation des sols qu'au moins une fois tous les cinq ans, le Gouvernement doit rendre public. Ce rapport qui présente l'évolution de l'artificialisation des sols au cours des années civiles précédentes, dresse le bilan en matière de lutte contre l'artificialisation et évalue l'efficacité des mesures de réduction de l'artificialisation, doit également tenir compte des apports de la présente loi. Ainsi ::
«Il dresse un bilan des effets de la loi n° 2023-630 du 20 juillet 2023 visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs de lutte contre l'artificialisation des sols et à renforcer l'accompagnement des élus locaux, en particulier des conditions de la territorialisation des objectifs de gestion économe de l'espace et de lutte contre l'artificialisation des sols, notamment de la garantie d'une surface minimale de consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers.
« Il retrace la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers occasionnée par les projets d'envergure nationale ou européenne qui présentent un intérêt général majeur, au sens du 8° du III de l'article 194 de la présente loi. Il fait état de la prise en compte aux échelles régionale et intercommunale des projets d'intérêt général.
« Il examine les incidences du régime de limitation de l'artificialisation sur la production de logements, notamment de logements sociaux, et sur la réalisation de projets concourant à la transition écologique ou au développement économique des territoires.
« Il contient un examen approfondi des conséquences de ce régime sur la préservation de l'environnement naturel et de la biodiversité et sur la prise en compte des incidences de la disponibilité locale de la ressource en eau. »

    L'article 9 prévoit que dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport relatif à la fiscalité comme outil de lutte contre l'artificialisation des sols.

Pas de saisine préalable du Conseil Constitutionnel

Rubriques :  collectivités territoriales / environnement / urbanisme, logement, travaux publics, voirie

Voir aussi :
Loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets


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