Considérant
que l'arrêté du 20 décembre 1978, abrogeant la mesure d'expulsion dont le sieur
Cohn-Bendit était l'objet depuis le 24 mai 1968, n'a pas eu pour effet de rapporter la
décision, en date du 2 février 1976, par laquelle le ministre de l'intérieur avait
refusé de mettre fin à cette mesure et que le sieur Cohn-Bendit a déférée au tribunal
administratif de Paris; qu'ainsi, ni la demande présentée par le sieur Cohn-Bendit
devant le tribunal administratif, ni, par suite, l'appel interjeté par le ministre de
l'intérieur du jugement rendu sur cette demande le 21 décembre 1977, ne sont devenus
sans objet; qu'il y a lieu, dès lors, pour le Conseil d'Etat, de statuer sur le recours
du ministre de l'intérieur;
Considérant que, d'après l'article 56 du traité
instituant la Communauté économique européenne en date du 25 décembre 1957, dont
aucune stipulation n'habilite un organe des communautés européennes à prendre, en
matière d'ordre public, des règlements directement applicables dans les Etats membres,
la coordination des dispositions législatives et réglementaires "prévoyant un
régime spécial pour les ressortissants étrangers et justifiées par des raisons d'ordre
public, de sécurité publique et de santé publique" fait l'objet de directives du
Conseil, arrêtées sur proposition de la Commission et après consultation de
l'Assemblée; qu'il ressort clairement de l'article 189 du traité du 25 mars 1957 que si
ces directives lient les Etats membres "quant au résultat à atteindre" et si,
pour atteindre le résultat qu'elles définissent les autorités nationales sont tenues
d'adapter la législation et la réglementation des Etats membres aux directives qui leur
sont destinées, ces autorités restent seules compétentes pour décider de la forme à
donner à l'exécution des directives et pour fixer elles-mêmes, sous le contrôle des
juridictions nationales, les moyens propres à leur faire produire effet en droit interne;
qu'ainsi, quelles que soient d'ailleurs les précisions qu'elles contiennent à
l'intention des Etats membres les directives ne sauraient être invoquées par les
ressortissants de ces Etats à l'appui d'un recours dirigé contre un acte administratif
individuel; qu'il suit de là que le sieur Cohn-Bendit ne pouvait utilement soutenir pour
demander au tribunal administratif d'annuler la décision du ministre de l'intérieur en
date du 2 février 1976, que cette décision méconnaîtrait les dispositions de la
directive arrêtée le 25 février 1964 par le Conseil des communautés européennes en
vue de coordonner, dans les conditions prévues par l'article 56 du traité de Rome, les
mesures spéciales aux étrangers en matière de déplacement et de séjour justifiées
par des raisons d'ordre public, de sécurité publique et de santé publique; que dès
lors, à défaut de toute contestation sur la légalité des mesures réglementaires
prises par le gouvernement français pour se conformer aux directives arrêtées par le
Conseil des communautés européennes, la solution que doit recevoir la requête du sieur
Cohn-Bendit ne peut en aucun cas être subordonnée à l'interprétation de la directive
du 25 février 1964; que, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens du
recours, le ministre de l'intérieur est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le
jugement attaqué en date du 21 décembre 1977, le tribunal administratif de Paris a
renvoyé à la cour de justice des communautés européennes des questions relatives à
l'interprétation de cette directive et sursis à statuer jusqu'à la décision de la
cour;
Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il y a
lieu de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Paris pour être statué ce
qu'il appartiendra sur la demande du sieur Cohn-Bendit (annulation du jugement; renvoi) |