CE 10 janvier 1902 Compagnie nouvelle du gaz de Deville-lès-Rouen n° 94624 
Gaja
mutabilité des contrats administratifs

Fiche

     Considérant que la commune de Deville-lès-Rouen soutient que, si elle a concédé à la compagnie requérante le privilège exclusif de l'éclairage par le gaz, le privilège, dans le silence des traités de 1874 et de 1887, ne s'étend pas à l'éclairage par tout autre moyen, et notamment par celui de l'électricité, la commune n'ayant pas renoncé au droit de faire profiter ses habitants de la découverte d'un nouveau mode d'éclairage ;
     Considérant que le silence gardé sur ce point par les premières conventions de 1874 est facile à expliquer et doit être interprété en faveur de la compagnie du gaz; qu'il en est autrement du défaut de toute stipulation dans le traité de prorogation intervenu en 1887, époque où l'éclairage au moyen de l'électricité fonctionnait déjà dans des localités voisines; qu'à cet égard, les parties sont en faute de n'avoir pas manifesté expressément leur volonté, ce qui met le juge dans l'obligation d'interpréter leur silence, de rechercher quelle a été en 1887 leur commune intention ; 
     Considérant qu'il sera fait droit à ce qu'il y a de fondé dans leurs prétentions contraires en reconnaissant à la Compagnie du gaz le privilège de l'éclairage par n'importe quel moyen et à la commune de Deville la faculté d'assurer ce service au moyen de l'électricité, en le concédant à un tiers dans le cas où la compagnie requérante dûment mise en demeure refuserait de s'en charger aux conditions acceptées par ce dernier;
     Considérant, il est vrai, que la commune allègue que les longues négociations engagées sans résultat dès 1893 entre elle et la compagnie, à la suite desquelles est intervenu le traité passé en janv. 1897 avec le sieur Lemoine constituent une mise en demeure suffisante pour rendre ce traité définitif ;
     Mais considérant que les négociations antérieures à la solution d'un litige qui porte sur l'étendue des obligations imposées à chacune des parties dans le traité de 1887, ne peuvent remplacer la mise en demeure préalable à l'exercice du "droit de préférence" reconnu par la présente décision en faveur de la compagnie requérante ; (annulation de l'arrêté du conseil de préfecture de la Seine-Inférieure en date du 9 déc. 1893 ; dans le délai d'un mois à compter de la notification de la précédente décision, la commune de Deville-lès-Rouen mettra la compagnie du gaz en demeure de déclarer, avant l'expiration du mois suivant, si elle entend se charger du service de l'éclairage au moyen de l'électricité dans les conditions du traité passé avec le sieur Lemoine ; sursis à statuer jusqu'après l'exécution à donner à l'art. 2 ci-dessus sur la demande de dommages-intérêts formée par la compagnie du gaz)

 

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