Loi n° 2015-925 du 29 juillet 2015 relative à la réforme du droit d'asile (Lien Legifrance, JO 30/07/2015, p. 12977)
Les principales dispositions
La loi de 36 articles réforme le droit d'asile. Elle assure la transposition de la directive du 13 décembre 2011 dite « qualification », des directives du 26 juin 2013 dites « procédures » et « accueil », et intègre aussi le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 (voir en bas de page les références complètes).
Chapitre Ier : Dispositions relatives aux conditions d'octroi de l'asile (art. 1er à 5)
L'intitulé du titre Ier du livre VII du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) devient « Les conditions d'octroi de l'asile » pour être mis en cohérence avec le contenu (art. 1er).
L'article L. 711-2 du CESEDA porte sur les notions d'actes et de motifs de persécution, notamment par un renvoi aux articles 9 et 10 de la directive « qualification » du 13 décembre 2011, qui déclinent ou précisent ces notions figurant à l'article 1er de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés (art. 3).
Les dispositions pertinentes relatives aux clauses d'exclusion et aux clauses de cessation du statut de réfugié, mais aussi aux cas de statuts obtenus frauduleusement, sont ajoutées et assorties des précisions, notamment procédurales, découlant de la directive « qualification » (art. 3 ajoutant les articles L. 711-3 à L. 711-6 dans le CESEDA).
La rédaction des articles L. 712-1, L. 712- 2 et L. 712-3 du CESEDA relatifs à la protection subsidiaire est adaptée à la directive « qualification » (art. 4). Ajouté dans le CESEDA l'article L. 712-4 est relatif aux conséquences à tirer en cas de protection subsidiaire obtenues par fraude.
La rédaction des articles L. 713-1, L. 713- 2 et L. 713-3 du CESEDA portant sur les dispositions communes à la qualité de réfugié et à la protection subsidiaire est modifiée pour être adaptée à la directive « qualification » (art. 5). Ajouté dans le CESEDA l'article L. 713-4 porte sur les besoins d'une protection après le départ du pays d'origine et, en particulier, sur les risques résultant d'activités exercées après ce départ, en conformité avec l'article 5 de la directive. Quant aux articles L. 713-5 et 713-6 insérés dans le CESEDA, ils prévoient que l'autorité judiciaire communique au directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et au président de la Cour nationale du droit d'asile, sur demande ou d'office, tout élément recueilli au cours d'une instance de nature à faire suspecter un cas d'exclusion ou de fraude.
Chapitre II : Dispositions relatives au statut d'apatride (art. 6 )
Le livre VIII du CESEDA est complété par un titre Ier bis consacré au statut d'apatride (art. 6 ajoutant les art. L. 812-1 à L. 812-8).
Chapitre III : Dispositions relatives à la procédure d'examen des demandes d'asile (art. 7 à 16)
Des modifications sont apportées à la procédure d'examen des demandes d'asile.
Section 1 : Dispositions générales (art. 7 à 12)
L'impartialité de l'OFPRA est consacrée ainsi que son indépendance : l'absence d'instructions données à l'OFPRA dans l'accomplissement de ses missions qui sont la reconnaissance de la qualité de réfugié ou l'octroi du bénéfice de la protection subsidiaire ainsi que la protection juridique et administrative des réfugiés et apatrides ainsi que celle des bénéficiaires de la protection subsidiaire (art. 7 modifiant l'art. L. 721-2 du CESEDA). En outre, par dérogation à l'article 4 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, l'anonymat des agents de l'office est garanti afin de permettre une instruction sereine et impartiale et mettre à l'abri de toutes pressions. L'OFPRA établit chaque année un rapport retraçant son activité, fournissant des données quantitatives et qualitatives présentées par sexe sur la demande d'asile et l'apatridie et présentant les actions de formation délivrées aux agents (art. 7 insérant l'art. L. 721-4 dans le CESEDA).
L'exigence de parité entre les femmes et les hommes est étendue au conseil d'administration de l'OFPRA (art. 8 modifiant l'art. L. 722-1 du CESEDA).
Les modalités de désignation par le conseil d'administration de l'OFPRA des pays considérés comme des pays d'origine sûrs sont modifiées : d'une part, en adoptant une définition conforme à la directive « procédures » et, d'autre part, en renforçant l'exigence de pertinence et d'actualité de la liste (art. 9 modifiant l'art. L. 722-1 CESEDA). Les présidents des commissions permanentes chargées des affaires étrangères et des commissions permanentes chargées des lois constitutionnelles de l'Assemblée nationale et du Sénat, une association de défense des droits de l'homme, une association de défense des droits des étrangers ou des demandeurs d'asile ou une association de défense des droits des femmes ou des enfants peuvent saisir le conseil d'administration, dans des conditions prévues par décret en Conseil d'Etat, d'une demande tendant à l'inscription ou à la radiation d'un Etat sur la liste des pays considérés comme des pays d'origine sûrs. Un pays est considéré comme un pays d'origine sûr lorsque, sur la base de la situation légale, de l'application du droit dans le cadre d'un régime démocratique et des circonstances politiques générales, il peut être démontré que, d'une manière générale et uniformément pour les hommes comme pour les femmes, il n'y est jamais recouru à la persécution, ni à la torture, ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants et qu'il n'y a pas de menace en raison d'une violence qui peut s'étendre à des personnes sans considération de leur situation personnelle dans des situations de conflit armé international ou interne.
Conformément au second alinéa de l'article 40 du code de procédure pénale, le directeur général de l'office transmet au procureur de la République tout renseignement utile ayant conduit au rejet d'une demande d'asile ou d'apatridie motivé par certaines clauses d'exclusion (art. 10 modifiant l'art. L. 722-3 du CESEDA).
Le chapitre III du titre II du livre VII, relatif à l'examen des demandes d'asile par OFPRA est profondément remanié et subdivisé en quatre sections (art. 11) : 1° les garanties procédurales et obligations du demandeur (articles L. 723-1 à L. 723-10) ; 2° les demandes irrecevables (article L. 723-11) ; 3° le retrait d'une demande ou la renonciation à une demande (articles L. 723-12 et L. 723-14) ; 4° les demandes de réexamen (articles L. 723-15 et L. 723-17). On peut notamment relever les éléments suivants. Les hypothèses de recours à une procédure accélérée qui remplace l'actuelle procédure prioritaire, sont plus nombreuses (art. 723-2) : cette procédure peut être mise en oeuvre par détermination de la loi (pays d'origine sûr, demande de réexamen), par l'OFPRA ou sur constats de l'autorité administrative (refus de donner ses empreintes digitales, menace grave pour l'ordre public,, ...). L'office peut demander à la personne sollicitant l'asile de se soumettre à un examen médical (art. L. 723-5). L'obligation de convoquer le demandeur pour un entretien personnel à l'OFPRA est généralisée et ses modalités de déroulement modifiées (art. L. 723-6 et L. 723-7). Ainsi, l'entretien personnel mené avec le demandeur, ainsi que les observations formulées, font l'objet d'une transcription versée au dossier de l'intéressé et la transcription est transmis au demandeur. Il est désormais expressément spécifié que la collecte par l'OFPRA d'informations nécessaires à l'examen d'une demande d'asile ne doit pas avoir pour effet de divulguer aux auteurs présumés de persécutions ou d'atteintes graves l'existence de cette demande d'asile ou d'informations la concernant (art. 723-10). Diverses autres dispositions ont pour objet d'adapter la procédure d'examen à la directive « procédures » ou à la jurisprudence.
La procédure de fin de la protection, c'est-à-dire lorsque l'Office français de protection des réfugiés et apatrides envisage de mettre fin au statut de réfugié ou au bénéfice de la protection subsidiaire, est explicitée dans un nouveau chapitre (art. 12 insérant les art. L. 724-1 à L. 724-3).
Section 2 : Dispositions relatives à l'examen des demandes d'asile à la frontière (art. 13)
Les hypothèses dans lesquelles le ministre chargé de l'immigration peut refuser l'entrée en France à un étranger qui se présente à la frontière et demande à bénéficier du droit d'asile sont énumérées limitativement (art. L. 213-8-1) : 1° L'examen de la demande d'asile relève de la compétence d'un autre Etat en application notamment du règlement Dublin ; 2° La demande d'asile est irrecevable en application de l'article L. 723-11 ; 3° la demande d'asile est manifestement infondée et la loi définit ce qu'il faut ainsi entendre. Sauf dans le cas 1°, la décision de refus du ministre ne peut être prise qu'après consultation de l'OFPRA et l'avis de l'office, s'il est favorable à l'entrée en France de l'intéressé au titre de l'asile, lie le ministre chargé de l'immigration.
Section 3 : Dispositions relatives à l'examen des demandes d'asile en rétention (art. 14 à 16)
Le livre V du CESEDA est complété par un nouveau chapitre VI intitulé « Demandes d'asile en rétention » (art. 14 insérant les articles L. 556-1 et L. 556-2). Un article de coordination est créé dans le code de justice administrative (insertion de l'article L. 777-2). Le nouvel article L. 556-1 a pour objet de supprimer tout caractère automatique au maintien en rétention du demandeur d'asile ainsi qu'à l'examen de sa demande selon une procédure accélérée, qui est proscrit par les jurisprudences de la Cour de justice de l'Union européenne et de la Cour européenne des droits de l'homme. L'autorité préfectorale ne peut, sans préjudice de la décision du juge des libertés et de la détention sur la prolongation de la rétention, décider de maintenir en rétention le demandeur que si elle estime que la demande d'asile est présentée dans le seul but de faire échec à l'exécution de la décision d'éloignement. Cette demande d'asile est alors examinée par l'OFPRA selon une procédure accélérée, mais il est mis fin au maintien en rétention si l'Office considère qu'il ne peut statuer selon cette procédure. De plus, en cas de décision négative de l'OFPRA sur la demande d'asile, l'intéressé a la possibilité de former un recours devant la CNDA contre cette décision et de saisir le juge administratif, par la voie d'un recours suspensif exercé dans des délais courts, afin qu'il ordonne à l'administration, s'il juge que la demande n'est pas dilatoire, d'autoriser le demandeur à se maintenir en France jusqu'à la décision de la CNDA, ce qui entraîne la fin de la rétention.
Chapitre IV : Dispositions relatives à la Cour nationale du droit d'asile (art. 17)
Des délais d'examen des recours devant la CNDA sont désormais prévus (article L. 731-2) : d'une manière générale, un délai de cinq mois est imparti au juge de l'asile pour statuer mais le délai est de cinq semaines pour les décisions de l'OFPRA prises sur le fondement des articles L. 723-2 (procédure accélérée) et L. 723-10 (décisions d'irrecevabilité).
L'organisation en « sections » de la CNDA est remplacée par une organisation en « formations de jugement » (art. L. 732-1). Les articles du code de justice administrative sont modifiés par coordination : modifications des articles L. 233-5, L. 234-3 et L. 234-4 et abrogation de l'article L. 234-3-1.
La possibilité du huis clos pour les audiences devant la cour est consacrée (article L. 733-1-1).
La qualité de juge de pleine juridiction de la CNDA est affirmée lorsqu'elle statue sur une demande d'asile (article L. 733-5). Elle ne peut annuler une décision de l'OFPRA et lui renvoyer l'examen de la demande d'asile que lorsqu'elle juge que l'office a pris sa décision sans procéder à un examen individuel de la demande ou en se dispensant, en dehors des cas prévus par la loi, d'un entretien personnel avec le demandeur.
La loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique est modifiée pour tenir compte du remplacement de la Commission des recours des réfugiés par la CNDA et devant la Cour nationale du droit d'asile, le bénéfice de l'aide juridictionnelle est reconnu comme étant de plein droit, sauf si le recours est manifestement irrecevable (ajout de l'art. 9-4).
Chapitre V : Dispositions relatives à l'accès à la procédure d'asile et à l'accueil des demandeurs (art. 18 à 27)
L'intitulé du titre IV du livre VII du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile devient : « Accès à la procédure et conditions d'accueil des demandeurs d'asile » (art. 18). Il comprend quatre chapitres.
Le chapitre Ier du titre IV (articles L. 741-1 à L. 741-4), désormais consacré à l'enregistrement de la demande d'asile est entièrement refondu (art. 19). Le nouveau dispositif est conforme à la directive « procédures » qui établit une distinction entre la présentation d'une demande d'asile, son enregistrement par une autorité compétente (dans un délai de trois jours qui peut être porté jusqu'à dix jours en cas de nombreuses demandes simultanées) et l'introduction formelle de celle-ci devant « l'autorité responsable de la détermination ». Cette distinction préserve cependant le partage des compétences entre l'autorité administrative chargée de l'enregistrement de la demande et de la mise en œuvre du règlement « Dublin II » et l'OFPRA, exclusivement compétent pour statuer sur le fond de la demande. Lorsque l'enregistrement de sa demande d'asile a été effectué, l'étranger se voit remettre une attestation de demande d'asile, sauf s'il demande l'asile à la frontière ou en rétention. (article L. 741-1). Lorsque l'examen de la demande d'asile relève de la compétence de la France, l'étranger introduit sa demande auprès de l'OFPRA dans un délai fixé par décret en Conseil d'Etat (art. L. 741-2). L'office ne peut être saisi d'une demande d'asile que si celle-ci a été préalablement enregistrée par l'autorité administrative compétente et si l'attestation de demande d'asile a été remise à l'intéressé. Des dispositions particulières s'appliquent aux mineurs isolés (art. L. 741-3 et L. 741-4).
Un nouveau chapitre II (articles L. 742-1 à L. 742-6) portant sur la procédure de détermination de l'Etat responsable de l'examen de la demande d'asile est créé dans le titre IV du livre VII du CESEDA (art. 20). Il est relatif à l'application du règlement Dublin et de son règlement d'application qui sont d'application directe, mais dont certaines dispositions nécessitent des adaptations de la législation nationale, notamment s'agissant du droit à un recours effectif contre la décision de transfert. Une attestation de demande d'asile mentionnant la procédure dont il fait l'objet, renouvelable durant la procédure de détermination de l'Etat responsable et, le cas échéant, jusqu'à son transfert effectif à destination de cet Etat est remise au demandeur d'asile placé sous procédure « Dublin » attestant de sa qualité de demandeur d'asile (art. L. 742-1). Le principe constitutionnel selon lequel la France peut examiner toute demande d'asile même si cette demande ne relève pas de sa compétence est rappelée. Un demandeur d'asile peut être assigné à résidence le temps nécessaire à la mise en œuvre de la procédure de détermination de l'État membre responsable de sa demande (article L. 742-2). Le régime juridique de la décision de transfert vers l'État membre responsable de l'examen de sa demande d'asile est détaillé (art. L. 742-3) et un recours spécifique contre cette décision est institué conformément à l'article 27 du règlement Dublin qui impose aux États membres de prévoir dans leur droit national un recours « effectif » (art. L. 742-4). Il s'agit d'un recours en annulation ayant un effet suspensif de la décision de transfert (article L. 742-5). En cas d'annulation de la décision de transfert par le juge administratif, il est mis fin aux mesures de surveillance et la situation de l'intéressé est réexaminée (art. L. 742-6). Par coordination, un nouveau chapitre est ajouté dans le code de justice administrative intitulé « Le contentieux des décisions de transfert vers l'Etat responsable de l'examen de la demande d'asile » (art. L. 777-3).
Un nouveau chapitre III consacré au droit au maintien sur le territoire français des demandeurs d'asile est créé dans le titre IV du livre VII du CESEDA (art. 21 ajoutant les articles L. 743-1 à L. 743-5). En effet, le nouveau dispositif rompt avec le dispositif actuel fondé sur une distinction entre les demandeurs d'asile provisoirement admis au séjour et ceux qui ne le sont pas. Conformément à la directive « procédures », il confère à tous les demandeurs d'asile le droit au maintien sur le territoire. Ce droit au maintien est accordé le temps de l'examen de la demande d'asile par l'OFPRA et, le cas échéant, par la CNDA, le caractère suspensif du recours devant cette juridiction étant généralisé, y compris s'agissant des demandes d'asile examinées selon la procédure accélérée. L'article L. 743-1 prévoit ainsi que l'attestation de demande d'asile vaut droit au maintien sur le territoire durant la durée de la procédure d'examen par l'OFPRA et, le cas échéant, par la CNDA. Ce dispositif se substitue au dispositif actuel d'admission provisoire au séjour. Il bénéficie à tous les demandeurs d'asile, indépendamment de la procédure suivie par l'OFPRA (procédure normale ou accélérée). L'article L. 743-2 définit les cas dans lesquels l'attestation de demande d'asile peut être refusée, retirée ou son renouvellement refusé, entraînant pour le demandeur d'asile la perte de son droit à se maintenir sur le territoire. Ces cas sont définis en stricte conformité avec la directive « procédures ». L'article L. 743-3 prévoit que le demandeur placé en procédure Dublin a la droit de se maintenir sur le territoire pendant toute la durée de la procédure et jusqu'à son transfert vers l'État membre responsable de l'examen de sa demande d'asile. L'article L. 743-4 qui reprend, tout en les adaptant, les dispositions de l'article L. 742-7 actuel du CESEDA, rappelle le principe selon lequel l'étranger dont la demande d'asile a été rejetée et qui ne peut obtenir un titre de séjour pour un autre motif doit quitter volontairement le territoire sous peine de faire l'objet d'une mesure de retour forcé. L'article L. 743-5 reprend, tout en les adaptant, les dispositions de l'article L. 742-6 actuel du CESEDA : cet article vise à garantir qu'une personne, sous le coup d'une mesure d'éloignement, ne puisse être effectivement éloignée tant que l'OFPRA ou la CNDA n'a pas statué sur sa demande d'asile. L'article L. 311-5 est modifié pour être mis en cohérence avec le nouveau dispositif.
Lorsque l'OFPRA ou la CNDA a reconnu à l'étranger la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire, il est admis à demander respectivement une carte de résident et une carte de séjour et il est mis en possession d'un récépissé de demande de titre de séjour, qui vaut autorisation de séjour d'une durée de validité de six mois renouvelable (art. 21 ajoutant les art. L. 311-5-1 et L. 311-5-2 dans le CESEDA).
Un nouveau chapitre IV consacré aux conditions d'accueil des demandeurs d'asile complète le titre IV du livre VII du CESEDA (art. 23 ajoutant les art. L. 744-1 à 744-11). Il comprend cinq sections.
La section 1 consacrée au dispositif national d'accueil prévoit les conditions matérielles d'accueil du demandeur d'asile (prestations et allocation), proposées à chaque demandeur d'asile par l'Office français de l'immigration et de l'intégration après l'enregistrement de la demande d'asile par l'autorité administrative compétente. Le schéma national d'accueil des demandeurs d'asile arrêté par le ministre chargé de l'asile fixe la répartition des places d'hébergement destinées aux demandeurs d'asile sur le territoire national. Un schéma régional établi par le représentant de l'Etat dans la région fixe les orientations en matière de répartition des lieux d'hébergement pour demandeurs d'asile sur le territoire de la région et présente le dispositif régional prévu pour l'enregistrement des demandes ainsi que le suivi et l'accompagnement des demandeurs d'asile. Sans préjudice de la participation financière demandée aux demandeurs d'asile en fonction de leurs ressources, les frais d'accueil et d'hébergement dans les lieux d'hébergement destinés aux demandeurs d'asile sont pris en charge par l'Etat. Les décisions d'admission dans un lieu d'hébergement pour demandeurs d'asile, de sortie de ce lieu et de changement de lieu sont prises par l'Office français de l'immigration et de l'intégration, après consultation du directeur du lieu d'hébergement, sur la base du schéma national d'accueil des demandeurs d'asile et, le cas échéant, du schéma régional et en tenant compte de la situation du demandeur. Le représentant de l'Etat dans le département peut s'opposer pour des motifs d'ordre public à la décision d'admission d'un demandeur d'asile dans un lieu d'hébergement. Dans le cadre de sa mission d'accueil des demandeurs d'asile définie à l'article L. 5223-1 du code du travail, l'Office français de l'immigration et de l'intégration coordonne la gestion de l'hébergement dans les lieux d'hébergement. Les personnes morales chargées de la gestion des lieux d'hébergement sont tenues de déclarer à l'office, dans le cadre du traitement automatisé de données, les places disponibles dans les lieux d'hébergement. Ces personnes morales sont tenues d'alerter l'autorité administrative compétente en cas d'absence injustifiée et prolongée des personnes qui y ont été orientées pour la durée de la procédure et en cas de comportement violent ou de manquement grave au règlement du lieu d'hébergement. Les lieux d'hébergement accueillent les demandeurs d'asile pendant la durée d'instruction de leur demande d'asile ou jusqu'à leur transfert effectif vers un autre Etat européen. Cette mission prend fin à l'expiration du délai de recours contre la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou à la date de la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile ou à la date du transfert effectif vers un autre Etat, si sa demande relève de la compétence de cet Etat. Les personnes morales qui assurent la gestion du lieu d'hébergement peuvent exiger du demandeur le versement d'une caution. Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions dans lesquelles les personnes s'étant vu reconnaître la qualité de réfugié ou accorder le bénéfice de la protection subsidiaire et les personnes ayant fait l'objet d'une décision de rejet définitive peuvent être maintenues dans un lieu d'hébergement à titre exceptionnel et temporaire. Lorsque, après une décision de rejet définitive, le délai de maintien dans un lieu d'hébergement prend fin, l'autorité administrative compétente peut, après mise en demeure restée infructueuse, demander en justice qu'il soit enjoint à cet occupant sans titre d'évacuer ce lieu.
La section 2 est consacrée à l'évaluation des besoins. A la suite de la présentation d'une demande d'asile, l'Office français de l'immigration et de l'intégration est chargé de procéder, dans un délai raisonnable et après un entretien personnel avec le demandeur d'asile, à une évaluation de la vulnérabilité de ce dernier afin de déterminer, le cas échéant, ses besoins particuliers en matière d'accueil. Dans la mise en œuvre des droits des demandeurs d'asile et pendant toute la période d'instruction de leur demande, il est tenu compte de la situation spécifique des personnes vulnérables. L'évaluation de la vulnérabilité vise, en particulier, à identifier les mineurs, les mineurs non accompagnés, les personnes en situation de handicap, les personnes âgées, les femmes enceintes, les parents isolés accompagnés d'enfants mineurs, les victimes de la traite des êtres humains, les personnes atteintes de maladies graves, les personnes souffrant de troubles mentaux et les personnes qui ont subi des tortures, des viols ou d'autres formes graves de violence psychologique, physique ou sexuelle, telles que des mutilations sexuelles féminines. L'évaluation de la vulnérabilité du demandeur est effectuée par des agents de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ayant reçu une formation spécifique à cette fin.
La section 3 relative à l'orientation des demandeurs d'asile subordonne le bénéfice des conditions matérielles d'accueil à l'acceptation par le demandeur d'asile de l'hébergement proposé, déterminé en tenant compte de ses besoins, de sa situation au regard de l'évaluation et des capacités d'hébergement disponibles. Le bénéfice des conditions matérielles d'accueil peut être : 1° Suspendu si, sans motif légitime, le demandeur d'asile a abandonné le lieu d'hébergement qui a été déterminé, n'a pas respecté l'obligation de se présenter aux autorités, n'a pas répondu aux demandes d'informations ou ne s'est pas rendu aux entretiens personnels concernant la procédure d'asile ; 2° Retiré si le demandeur d'asile a dissimulé ses ressources financières ou a fourni des informations mensongères relatives à sa situation familiale ou en cas de comportement violent ou de manquement grave au règlement du lieu d'hébergement ; 3° Refusé si le demandeur présente une demande de réexamen de sa demande d'asile ou s'il n'a pas sollicité l'asile, sans motif légitime, dans le délai. La décision de suspension, de retrait ou de refus des conditions matérielles d'accueil est écrite et motivée. Elle prend en compte la vulnérabilité du demandeur. La décision est prise après que l'intéressé a été mis en mesure de présenter ses observations écrites dans les délais impartis.
La section 4 relative à l'allocation pour demandeur d'asile prévoit que le demandeur d'asile qui a accepté les conditions matérielles d'accueil proposées bénéficie de cette allocation s'il satisfait à des conditions d'âge et de ressources. L'Office français de l'immigration et de l'intégration ordonne son versement dans l'attente de la décision définitive lui accordant ou lui refusant une protection au titre de l'asile ou jusqu'à son transfert effectif vers un autre Etat responsable de l'examen de sa demande d'asile. Les blocages de comptes courants de dépôts ou d'avances ne peuvent avoir pour effet de faire obstacle à l'insaisissabilité de l'allocation. Un décret définit le barème de l'allocation pour demandeur d'asile, en prenant en compte les ressources de l'intéressé, son mode d'hébergement et, le cas échéant, les prestations offertes par son lieu d'hébergement. Peuvent également bénéficier de l'allocation pendant une durée déterminée, s'ils satisfont à des conditions d'âge et de ressources : 1° Les ressortissants étrangers bénéficiaires de la protection temporaire ; 2° Les ressortissants étrangers auxquels une carte de séjour temporaire a été délivrée en application de l'article L. 316-1 (étrangers ayant déposé plainte pour certaines infractions, témoigné dans une procédure pénale ou bénéficiant de mesures de protection).
La section 5 décide que l'accès au marché du travail peut être autorisé au demandeur d'asile lorsque l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, pour des raisons qui ne sont pas imputables au demandeur, n'a pas statué sur la demande d'asile dans un délai de neuf mois à compter de l'introduction de la demande. Dans ce cas, le demandeur d'asile est soumis aux règles de droit commun applicables aux travailleurs étrangers pour la délivrance d'une autorisation de travail.
Les conditions d'hébergement dans les centres d'accueil pour demandeurs d'asile sont précisées : ces centres ont pour mission d'assurer l'accueil, l'hébergement ainsi que l'accompagnement social et administratif des personnes dont la demande d'asile a été enregistrée, pendant la durée d'instruction de cette demande (art. 24 modifiant les articles L. 348-1 à L. 348-4 du code de l'action sociale et des familles).
Chapitre VI : Dispositions relatives au contenu de la protection (art. 28 à 30)
Les conditions de délivrance de la carte de séjour temporaire à l'étranger qui a obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire et aux membres de sa famille sont élargies, par dérogation son renouvellement est admis et un décret doit préciser le délai dans lequel elle doit être délivré après une décision de l'OFPRA ou de la CNDA (art. 28 modifiant l'art. L. 313-13 du CESEDA). Il en est de même, des conditions de délivrance de la carte de résident à l'étranger qui a obtenu le statut de réfugié et aux membres de sa famille (art. 28 modifiant le 8° de l'article L. 314-11). En particulier, il est désormais prévu que lorsque le statut a été reconnu à un mineur célibataire la carte de résident est délivré à ses ascendants directs au premier degré.
Il est expressément indiqué que lorsqu'il est mis fin au statut de réfugié ou au bénéfice de la protection subsidiaire par décision définitive de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou par décision de justice ou lorsque l'étranger renonce à ce statut ou à ce bénéfice, la carte de résident (réfugié) ou la carte de séjour temporaire (bénéficiaire de la protection subsidiaire) est retirée (ajout de l'art. L. 311-8-1 dans le CESEDA).
De même, il est précisé qu'en cas de reconnaissance de la qualité de réfugié ou d'octroi de la protection subsidiaire, l'autorité administrative abroge l'obligation de quitter le territoire français qui, le cas échéant, a été prise (ajout de l'article L. 511-5). Elle délivre sans délai au réfugié la carte de résident et au bénéficiaire de la protection subsidiaire la carte de séjour temporaire.
Le CESEDA est complété par un titre portant sur le contenu de la protection accordée (art. 29 ajoutant les art. L. 751-1 à L. 753-8) qui comprend trois chapitres. Le premier chapitre est relatif à l'information et à l'accès aux droits et reconnaît à l'étranger qui a obtenu le statut de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire et a signé le contrat d'accueil et d'intégration le bénéficie d'un accompagnement personnalisé pour l'accès à l'emploi et au logement. Le deuxième chapitre leur reconnaît le droit à la "réunification familiale" et la prise en compte de l'intérêt supérieur de l'enfant est affirmée dans les décisions portant sur un mineur auquel la qualité de réfugié a été accordée. Lorsqu'une protection au titre de l'asile a été octroyée à une mineure invoquant un risque de mutilation sexuelle, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, tant que ce risque existe et tant que l'intéressée est mineure, lui demande de se soumettre à un examen médical visant à constater l'absence de mutilation. Enfin, il est prévu la remise d'un document de voyage, à moins que des raisons impérieuses de sécurité nationale ou d'ordre public ne s'y opposent, à l'étranger titulaire d'un titre de séjour en cours de validité auquel la qualité de réfugié a été reconnu, à celui ayant obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire et à l'enfant étranger mineur du réfugié ou du bénéficiaire de la protection subsidiaire.
Chapitre VII : Dispositions relatives à l'intégration des réfugiés (art. 31)
Les centres provisoires d'hébergement sont institués en faveur des étrangers s'étant vu reconnaître la qualité de réfugié ou accorder le bénéfice de la protection subsidiaire (art. 31 ajoutant les art. L. 349-1 à L. 349-4 dans le code de l'action sociale et des familles). Ils ont pour mission d'assurer l'accueil, l'hébergement ainsi que l'accompagnement linguistique, social, professionnel et juridique des personnes qu'ils hébergent, en vue de leur intégration. Ils coordonnent les actions d'intégration en leur faveur. Les décisions d'admission dans un centre provisoire d'hébergement, de sortie de ce centre et de changement de centre sont prises par l'Office français de l'immigration et de l'intégration, après consultation du directeur du centre. Les personnes accueillies participent à proportion de leurs ressources à leurs frais d'hébergement, de restauration et d'entretien. Les conditions de fonctionnement et de financement des centres provisoires d'hébergement sont fixées par décret en Conseil d'Etat. L'Etat conclut une convention avec le centre provisoire d'hébergement ou un contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens avec la personne morale gestionnaire de ce centre.
Chapitre VIII : Dispositions relatives aux outre-mer (art. 32 et 33)
Un observatoire de l'asile évalue l'application de la politique de l'asile dans les départements et les collectivités d'outre-mer et en Nouvelle-Calédonie (art. 32 modifiant l'article L. 111-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile).
Les conditions d'application de la loi à Mayotte, en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie, etc. sont précisées (art. 32 modifiant diverses dispositions du CESEDA). Des dispositions particulières sont aussi prévues à la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique et La Réunion (art. L. 767).
Chapitre IX : Dispositions finales (art. 34 et 35)
L'article L. 5223-4 du code du travail est abrogé (art. 34). L'accès à la fonction publique de l'Etat prévu à l'article 1er de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique est ouvert aux agents contractuels de droit public occupant, à la date du 31 décembre 2013, un emploi de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII).
Les conditions d'entrée en vigueur des dispositions de la loi sont précisées (art. 35).
Plan de la loi
Chapitre Ier : Dispositions relatives aux conditions d'octroi de l'asile (art. 1er à 5)
Chapitre II : Dispositions relatives au statut d'apatride (art. 6 )
Chapitre III : Dispositions relatives à la procédure d'examen des demandes d'asile (art. 7 à 16)
Section 1 : Dispositions générales (art. 7 à 12)
Section 2 : Dispositions relatives à l'examen des demandes d'asile à la frontière (art. 13)
Section 3 : Dispositions relatives à l'examen des demandes d'asile en rétention (art. 14 à 16)
Chapitre IV : Dispositions relatives à la Cour nationale du droit d'asile (art. 17)
Chapitre V : Dispositions relatives à l'accès à la procédure d'asile et à l'accueil des demandeurs (art. 18 à 27)
Chapitre VI : Dispositions relatives au contenu de la protection (art. 28 à 30)
Chapitre VII : Dispositions relatives à l'intégration des réfugiés (art. 31)
Chapitre VIII : Dispositions relatives aux outre-mer (art. 32 et 33)
Chapitre IX : Dispositions finales (art. 34 et 35)
Références :
Directive dite « qualification » : Directive 2011/95/UE du Parlement Européen et du Conseil du 13 décembre 2011 concernant les normes relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pour pouvoir bénéficier d'une protection internationale, à un statut uniforme pour les réfugiés ou les personnes pouvant bénéficier de la protection subsidiaire, et au contenu de cette protection (refonte).
Directive dite « procédures » : Directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relative à des procédures communes pour l'octroi et le retrait de la protection internationale (refonte).
Directive dite « accueil » : directive 2013/33/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant des normes pour l'accueil des personnes demandant la protection internationale (refonte)..
Règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride (refonte).
GLOSSAIRE : Office français de protection des réfugiés et apatrides - Cour nationale du droit d'asile - contentieux de pleine juridiction - Office français de l'immigration et de l'intégration
Pas de saisine préalable du Conseil Constitutionnel
Rubrique : étrangers
Voir aussi :
Loi n° 2007-1631 du 20 novembre 2007 relative à la maîtrise de l'immigration, à l'intégration et à l'asile - Loi n° 2003-1176 du 10 décembre 2003 modifiant la loi n° 52-893 du 25 juillet 1952 relative au droit d'asile - CE avis cont. 20 novembre 2013 Cour nationale du droit d’asile (CNDA) n° 368676 - Décret n° 2015-1166 du 21 septembre 2015 pris pour l'application de la loi n° 2015-925 du 29 juillet 2015 relative à la réforme du droit d'asile - Décret n° 2015-1298 du 16 octobre 2015 pris pour l'application de la loi n° 2015-925 du 29 juillet 2015 relative à la réforme du droit d'asile et relatif à la procédure applicable devant la Cour nationale du droit d'asile