Loi n° 2010-769 du 9 juillet 2010 relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants (Lien Legifrance, JO 10/07/2010, p. 12762)
Les principales dispositions
La loi de 38 articles est la traduction législative des propositions de la mission d'évaluation de la politique de prévention et de lutte contre les violences faites aux femmes. Cette commission, qui a conclu ses travaux au mois de juillet 2009, a dressé l'état des lieux des politiques et des dispositifs visant à prévenir et à réprimer ces violences, ainsi qu'à protéger les femmes qui en sont victimes.
CHAPITRE Ier : PROTECTION DES VICTIMES (art. 1 à 22)
Le chapitre améliore la protection des victimes de violences et facilite l'accès des victimes au droit.CHAPITRE II : PREVENTION DES VIOLENCES (art. 23 à 29)
- Création d'une « ordonnance de protection » (art. 1er complétant le code civil par un titre consacré aux mesures de protection des victimes de violence, art. 515-9 à 515-13.) . Cette ordonnance provisoire délivrée par le juge des affaires familiales a pour objet de protéger, en urgence, les personnes qui sont en situation de danger. Elle intervient donc en amont d'un éventuel dépôt de plainte. Cette ordonnance peut être demandée par la victime de violences au sein de son couple, ou pour des violences commises par un « ex » conjoint, partenaire lié par un pacte civile de solidarité ou concubin. Le juge est habilité à prendre des mesures de protection immédiates et de stabilisation de la situation juridique et financière de la partie demanderesse pour une durée de quatre mois. Une ordonnance de protection peut également être délivrée pour protéger les personnes menacées de mariage forcé.
- En cas de prononcé de mesures éducatives, le juge peut également ordonner l'interdiction de sortie du territoire (art. 3 complétant l'art. 375-7 du code civil et art. 4 pour l'inscription au fichier des personnes recherchées).
- Inscription d'un nouveau délit sanctionnant la violation de certaines obligations imposées dans le cadre d'une ordonnance de protection des victimes (art. 5 insérant les art. 227-4-2 dans le code pénal). Ceci autorise la prise de mesures de contrainte (placement en garde à vue notamment) pour faire cesser la violation de ces obligations.
- Possibilité dérogatoire d'assigner à résidence en placement sous surveillance électronique mobile une personne mise en examen ou condamnée pour des violences ou des menaces contre un conjoint, concubin, partenaire ou ses enfants (art. 6 insérant l'article 142-12-1 dans le code de procédure pénale et l'article 131-36-12-1 dans le code pénal). Lorsque de surcroît une interdiction de rencontrer la victime a été prononcée, il peut être proposée à celle-ci l'attribution d'un dispositif de téléprotection lui permettant d'alerter les autorités publiques en cas de violation des obligations imposées au mis en examen ou le port d'un dispositif électronique permettant de signaler à distance que la personne mise en examen se trouve à proximité.
- Lorsque l'intérêt de l'enfant le commande ou lorsque la remise directe de l'enfant à l'autre parent présente un danger pour l'un d'eux, le juge en organise les modalités pour qu'elle présente toutes les garanties nécessaires (art. 7 modifiant l'art. 373-2-1 du code civil). A cette fin, il peut désigner un espace de rencontre.
- Lorsqu'il se prononce sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale, le juge doit aussi prendre en compte les pressions ou violences, à caractère physique ou psychologique, exercées par l'un des parents sur la personne de l'autre (art. 8 complétant l'art. 373-2-11).
- Introduction dans le code civil de nouveaux cas de retrait de l'autorité parentale : le juge peut la retirer au parent auteur ou complice d'un meurtre sur la personne de l'autre parent ou sur leur enfant (art. 9 complétant l'art. 378 du code civil).
- Amélioration de la sécurité juridique des personnes étrangères qui sont victimes de violences conjugales : délivrance ou renouvellement du titre de séjour ou d'une carte de séjour temporaire "vie privée et familiale" en cas de bénéfice d'une ordonnance de protection (art. 11 et 12 modifiant le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile). Un visa de retour doit être délivré par les autorités consulaires françaises à la personne de nationalité étrangère bénéficiant d'un titre de séjour en France dont le conjoint a, lors d'un séjour à l'étranger, dérobé les documents d'identité et le titre de séjour (art. 14). L'accès à l'aide juridictionnelle est accordé aux personnes étrangères qui bénéficient d'une ordonnance de protection (art. 15).
- Non-applicabilité des articles 62, 65 et 66 de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution ainsi que les articles L. 613-1 à L. 613-5 du code de la construction et de l'habitation à l'expulsion du conjoint, du partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou du concubin violent ordonnée par le juge aux affaires familiales sur le fondement de l'article 515-9 du code civil.(art. 18).
- Passation de conventions avec les bailleurs de logements pour réserver dans chaque département un nombre suffisant de logements, répartis géographiquement, à destination des personnes victimes de violences, protégées ou ayant été protégées par l'ordonnance de protection prévue aux articles 515-9 et suivants du code civil (art. 19 complétant l'article 5 de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en œuvre du droit au logement). Le plan départemental d'action pour le logement des personnes défavorisées prend également en compte les besoins des personnes victimes de violences au sein de leur couple ou au sein de leur famille, menacées de mariage forcé ou contraintes de quitter leur logement après des menaces de violences ou des violences subies effectivement (art. 19 complétant l'art. 4 précitée).
- Passation d'une convention entre l'Etat et les centres régionaux des œuvres universitaires visant à la réservation d'un nombre suffisant de logements à destination des personnes majeures victimes de violences inscrites dans un établissement scolaire ou universitaire qui sont protégées ou qui ont été protégées par l'ordonnance de protection prévue aux articles 515-9 et suivants du code civil (art. 20 modifiant l'article L. 822-1 du code de l'éducation).
- Annonce d'un rapport remis par le Gouvernement sur la mise en place d'une formation spécifique en matière de prévention et de prise en charge des violences faites aux femmes et des violences commises au sein du couple est présenté au Parlement avant le 30 juin 2011 (art. 21).
Ce chapitre a pour objet de renforcer la prévention des violences faites aux femmes.CHAPITRE III : REPRESSION DES VIOLENCES (art. 30 à 38)
- L'information consacrée à l'égalité entre les hommes et les femmes, à la lutte contre les préjugés sexistes et à la lutte contre les violences faites aux femmes et les violences commises au sein du couple est dispensée à tous les stades de la scolarité (art 23 insérant un art. L. 312-17-1 dans le code de l'éducation).
- Institution le 25 novembre d'une journée nationale de sensibilisation aux violences faites aux femmes (art. 24).
- Application des peines aggravées de l'art. 222-14 aux violences habituelles commises par le conjoint ou le concubin de la victime ou par le partenaire lié à celle-ci par un pacte civil de solidarité (art. 25).
- Prévention des préjugés sexistes et des violences contre les femmes dans les médias (art. 27 et 28 modifiant la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, la loi n° 49-956 du 16 juillet 1949 sur les publications destinées à la jeunesse et la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique) . Ouverture du droit de saisine du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) aux associations de défense des droits des femmes.
- Un rapport remis par le Gouvernement sur la création d'un Observatoire national des violences faites aux femmes est présenté au Parlement avant le 31 décembre 2010 (art. 29).
Ce chapitre accentue la répression des auteurs de violences faites aux femmes, en précisant certaines procédures et certains délits et en créant de nouvelles incriminations.Plan de la loi
- Présomption de non-consentement de la victime à la médiation pénale lorsqu'elle a saisi le juge aux affaires familiales en application de l'article 515-9 du code civil en raison de violences commises par son conjoint, son concubin ou le partenaire avec lequel elle est liée par un pacte civil de solidarité (art. 30 modifiant l'art. 41-1 du code de procédure pénale).
- Introduction de la notion de violences psychologiques (art. 31 insérant les art. 222-14-1 et 222-33-2 dans le code pénal). A l'instar du harcèlement moral, qui ne concerne que les relations professionnelles, le harcèlement au sein du couple ou entre les ex-membres du couple est désormais réprimé comme un délit puni de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende..
- Aggravation des peines en cas de meurtre pour refus de contracter un mariage : réclusion à perpétuité encourue (art. 33 complétant l'art. 221-4 du code pénal). Création du délit de contrainte au mariage afin de donner aux juges un instrument spécifique de lutte contre les mariages forcés. Entrent dans son champ tant les mariages forcés que les unions forcées. Par ailleurs, comme en matière de mutilations sexuelles, la législation française est également applicable en cas de mariage ou d'union forcés commis à l'étranger.
- Obligation pour les autorités consulaires françaises de prendre les mesures adaptées pour assurer, avec leur consentement, le retour sur le territoire français des personnes de nationalité française ou qui résident habituellement de manière régulière sur le territoire français lorsque ces personnes ont été victimes à l'étranger de violences volontaires ou d'agressions sexuelles commises dans le cadre d'un mariage forcé ou en raison de leur refus de se soumettre à un mariage forcé (art. 34).
- Les personnes physiques ou morales coupables de harcèlement sexuel ou de harcèlement moral encourent également la peine complémentaire d'affichage ou de diffusion de la décision (art. 35 insérant un art. 222-50-1 dans le code pénal).
- Suppression de la présomption du consentement des époux à l'acte sexuel en conséquence de l'introduction dans la loi, en 2006, de la reconnaissance du viol entre époux (art. 36 modifiant l'article 222-22 du code pénal).
- Conditions d'application de la loi outre-mer (art. 37).
- Entrée en vigueur des dispositions de la loi, immédiate ou à compter du 1er octobre 2010 pour les articles 1er et 2, le I de l'article 5, les articles 11, 12, 13, 15, 18, 20 et 22 (art. 38).
CHAPITRE Ier : PROTECTION DES VICTIMES (art. 1 à 22)
CHAPITRE II : PREVENTION DES VIOLENCES (art. 23 à 29)
CHAPITRE III : REPRESSION DES VIOLENCES (art. 30 à 38)
Pas de saisine préalable du Conseil Constitutionnel
Rubriques : droits civils, famille, dons et legs / droit, justice et professions juridiques
Voir aussi :
Décret n° 2012-1312 du 27 novembre 2012 relatif à la fixation par le juge de l'exercice du droit de visite dans un espace de rencontre